mercredi 12 novembre 2014

Cataract City

"You want to know how Cataract Falls came to be?" he said. "America swept all its shit north, Canada swept all its shit south, and the dregs of the dregs  washed up in a string of diddly-ass border towns, of which Cataract City is undoubtedly the diddliest.

Je m'étais déjà étendue sur The Fighter et Rust and Bones qui malgré l'adaptation génocidaire d'Audiard reste une putain de claque; Cataract City, dernier opus de Davidson est à la fois une reprise et  un dépliement des deux bouquins précédents. 

Dépliement, parce que plutôt long et avec un projet plus large: raconter une histoire d'amitié entre deux garçons  à  travers une série d'étapes marquantes et reprise, parce que tous les thèmes qui sont déjà dans Rust and Bones sont dedans.

Du point de vue de l'écriture, ça donne quelques chose de moins concis que dans les nouvelles, de plus posé et détaillé, moins nerveux - quelque chose qui pointait déjà dans The Fighter, mais dont le rythme était préservé par le format dyptique qui oscillait d'une histoire à l'autre. Ici, même si le point de vue temporel est pris à différents niveaux - récit à postériori/récit imbriqué - ça reste plutôt classique comme ligne narrative, avec parfois des épisodes un peu longuets - le trip dans les bois, limite fatiguant. Bizarrement, ça fonctionne en fait bien: on s'étonne un peu au début du découpage cinématographique ultra lent, travaillé à plein de niveaux sensoriels différents et d'une putain d'abondance de détails - mais c'est quand qu'y cogne didon? - mais une fois installé dans le rythme et surtout dans le cadre qui essaie de toucher à ce qui est immense et immobile dans l'air, en fait, ça se tient du point de vue fond/forme.

On suit donc l'évolution de deux marmots dans une ville du bout du monde, comme les aime Davidson: à la frontière, à la lisière même du monde civilisé, dans une ambiance redneck pulp avec dans le désordre: des courses de lévriers, des combats de chiens, des match de box illégaux, de la contrebande de clopes et des histoires de testostérone qui tournent mal. C'est un peu ça qui pêche pour moi: un côté surabondance de thématiques chères à Davidson (et au genre gracieusement par moi défini) qui fonctionnerait bien dans un recueil de nouvelles, mais qui fait un peu beaucoup pour un seul héros - genre, il leur arrive TOUT ce qu'il peut leur arriver de pourri dans ce coin du monde. Ça et quelques trucs un peu clichés ( les amis d'enfance devenus frères ennemis parce que des deux côtés de la loi, de ce style)

L'idée de base est plutôt ambitieuse: c'est à la fois le roman d'une ville, l'histoire d'une amitié et un genre de roman de formation (+ un recueil de nouvelles pulp qui revient hanter les interlignes, peut-être bien malgré l'auteur, preuve qu'on ne part jamais bien loin de là d'où on vient). Pour un projet avec une ambition pareille, ça reste lisible et même prenant. Pour ceux qui avaient aimé le côté uppercut des l'écriture des premiers textes, ça risque d'être un peu déroutant au début, mais qu'on ne s'inquiète pas: la première scène de fight arrive à mi-parcours et réchauffe les pages parfois ardues d'une bonne giclée de tripes, de plaies ouvertes cautérisées à vif et de cartilages défoncés. Comme un bon feu dans une cheminée un soir d'hiver, haaaaaa.

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