lundi 28 mars 2016

Ecran total

Mon cerveau était en deuil national toute la semaine, du coup, j'ai pas beaucoup cherché à faire des liens entre les trucs que j'ai vus - d'ailleurs dans un état un peu second pour cause de célébration de la vie, tout ça.


Ça fait un moment que je dois mater Evil Dead, un film qu'il est trop culte alors c'est fait - même si je ne vois pas trop en quoi c'est excepchioneul mais bon. C'est assez basique, en fait: des jeunes qui partent se faire un petit weekend dans les bois tous seuls, une vieille malédiction qui ressemble à un vieux virus qui bouffe la peau et pas de réseau. Bon, un des jeunes en question est en train de se faire une détox maison, pas le plus malin au fin fond des bois, mais bon. Du coup, quand le monstre débarque, on s'inquiète pas trop - c'est juste la droguée qui décuve et qui voit des choses bizarres, mais en fait non, c'est un livre qui t'explique comment ça va se passer, écrit dans une langue bizarre - mais aussi traduit en anglais pour qu'on comprenne bien. Bref, j'avoue avoir pas trop suivi, mais la fin est plutôt chouette, avec une histoire de résurrection et d'amour fraternel, puis une course à la tronçonneuse pas mauvaise. 

Insidious aussi manquait à ma culture et c'est chose faite. La présence de la méga énervante Rosie Byrne aurait pu me décourager, mais je me suis dit qu'elle allait y passer tôt ou tard - déception de ce côté par contre. Alors pour ce qui est de l'intrigue, c'est déjà plus complexe - y'a plein d'explications que si tu les rates, tu piges quenouille, alors attention. En gros, un mioche tombe dans le coma après avoir fait le foufou dans le grenier. Des trucs bizarres apparaissent dans la maison - des voix dans le babyphone, des gros monstres à tête rouge, des cadavres déguisés en Jack White - enfin tout ça. Après examen scientifique - pratiqué par une paire d'ados géants trouvés dans les chiottes de Comicon équipés de View Master et d'appareils photos vintage - il s'avère que c'est pas la maison, mais le petiot qui est hanté, car son corps astral est parti en vacances et qu'il est coincé à la douane, donc ne peut plus rentrer. C'est pas de bol, mais heureusement, il y a Findus, une petite vieille médium qui porte bien le masque à gaz et qui va tout nous expliquer. Alors c'est franchement pas mal pour un truc de maison hantée - enfin, de garçon hanté - par contre la fin est un peu longuette et part un peu en sucette. Ça fait bien bouh! par contre et c'est globalement plutôt beau finalement.

Je ne sais pas pourquoi, j'étais persuadée que Aubrey Plaza jouait dans Burying the ex, mais j'avais confondu avec Life after Beth (haha, je viens de capter la feinte). Bon du coup, c'est grosso modo la même histoire - la copine d'un peye quimpe puis revient d'entre les morts. Sauf qu'ici, le pauvre Kevin (on va dire qu'il s'appelle comme ça) était sur le point de larguer sa nana, une vegan à la voix super énervante, fan de platitudes et de tofu au bon sens. Il avait bien raison, cela dit, elle avait l'air trop chiante, mais hélas, la voilà qui revient à la charge pleine d'amour et de vers qui pendouillent dans ses cheveux - on peut comprendre que Kevin n'est pas trop jouasse, parce que même avec une bonne douche, elle doit quand même pas mal empester. En plus Kevin a une nouvelle meuf trop bonne qui fait des glaces avec des noms de vampires et qui, comme lui, est fan de films de zombies. Trop coule, mais avec une ex zombie dans les pattes, il est obligé de se la taper dans le coffre de son break - WTF?. Tout ça est un bon Z, bien assumé, pas mal drôle finalement, avec un petit côté Godard, si on regarde bien - tous ces extraits de films d'horreur, ces affiches, ça fait un peu citation et méta, quoi. 

Enfin, j'ai conclu cette quête existentielle avec Zardoz, auquel je n'ai pas tout compris, mais qui a l'avantage de nous présenter un Sean Connery dans la force de l'âge qui court en zlip rouge dans tous les sens avec un petit flingue à la con à la main. Il porte aussi parfois un costume/string inspiré de Borat, ce qui lui sied bizarrement bien.

My name is Bond, mazafaka
Alors pour ce qui est de l'histoire, voilà ce que j'en ai compris: dans un monde futuriste divisé en deux classes - les brutaux et les éternels - Zed, un pauvre brutal, se retrouve paumé chez les Eternels dans un vortex., un genre de bulle qui les protège du monde pas beau dans lequel les Brutaux passent leur temps à tuer des gens sur la plage. Bon, une fois que Zed est coincé dans le vortex, tout le monde veut a piece of him: il a l'air trop chou, trop sauvage et sa sueur a l'air de donner des micro-orgasmes aux gens qui la lèchent. Car oui, si ils sont bien malins et ont réduit le reste du monde en esclavage, les Eternels se font quand même gravement chier - tu m'étonnes - et deviennent donc complètement apathiques, du coup, plus personne fait la vaisselle et c'est le bordel. Donc tout le monde se met à vouloir un bout de Zed qui est pas content et le fait savoir. Il passe son temps à essayer de filer ou de casser des miroirs. Bon, plus sérieusement, le film est pas du tout mauvais, avec une chouette mise en scène d'un microcosme parfait-mais-en-fait-pas-que parce que c'est rien que des décadents dans le fond. Le côté futuriste laisse parfois un peu rêveur - des gros cristaux en plastoc qui émettent des ondes, des pistolets qui font piou piou, enfin tout ça. J'ai adoré le grand masque de pierre qui crache des flingues à la tête des gens - en fait une supercherie pour continuer à faire des Brutaux des la chair à canon. C'est bien psychédélique visuellement, un peu dans l'esprit de Point Blank pour les couleurs mais avec des jeux de miroir et de visuels tordus et plein d'effets sonores mystiques. 

Evil Dead, Alvarez, 2013
Insiduous, Wan, 2011
Burying the ex, Dante, 2014
Zardoz, Boorman, 1974
              

mercredi 23 mars 2016

Les tripes à l'air

J'ai pas l'habitude de commenter autre chose que des films avec des types qui aiment trop les tronçonneuses, mais là j'arrive pas à m'enlever un truc de la gueule et ce, depuis un moment: c'est comment qu'on en arrive là, au juste?

Comment on se lève un matin et on se dit qu'on va juste aller buter des gens qui ont rien demandé, des papas qui vont au boulot, des gosses en retard pour leurs cours, des vieux qui veulent être les premiers à la poste? C'est qui, c'est quoi, qui peut rendre suffisamment fous les gens pour leur faire croire que c'est une bonne idée? 

Parce qu'on peut dire que c'est des barbares, des animaux, des pas-humains qui ont fait ça, mais ce qui est effarant, terrifiant, ce qui glace le sang, c'est que ces types-là y sont nés comme vous et moi, avec deux petites jambes, deux petits bras, ils ont appris à écrire en tirant la langue sur le côté, ils se sont battus à la récré, ils ont fumé des clopes dans les chiottes, ils ont dragué des petites meufs rue Neuve et ils les ont emmenées manger des sunday au McDo. Ces types, ils sont nés ici, là, à 15 km de chez moi, on a été aux mêmes écoles, aux mêmes soirées, on s'est peut-être bien croisés à l'occasion.

Alors c'est quoi qui fait qu'ils se réveillent un matin avec rien, pas de vie, pas d'amour, pas d'envie, rien q'un putain d'horizon barbouillé de merde et même pas un bout de PQ pour se nettoyer un petit coin bleu, rien qui existe au-delà du néant, du désespoir pur, rien à part l'envie de se mettre une ceinture d'explosifs autour du bide et d'appuyer sur un bouton. Putain, mais mon bide j'y pense que pour savoir quand j'arrête la spéciale et que je commence à mettre un môme dedans, y'a pas moyen qu'on me fasse avaler que c'est une bonne idée de lui mettre du TNT autour. 

Parce qu'on peut dire salafisme, radicalisme, islamisme, mais les fanatiques ils se sont contentés de cueillir un désespoir absolu, un manque de sens total, qui pousse, là, ici, bien enraciné, bien nourri des mécanismes de notre société à moitié dingue. Putain, la société, c'est nous, les quidams en short, les connards en 4x4, les pouffes à faux ongles, c'est nous les étudiants, les parents, les profs, c'est nous et on a rien su, rien pu, rien vu mais il va aussi falloir arrêter, parce que c'est notre monde, à nous, celui pour lequel on lève les rideaux tous les matins, c'est à nous aussi, ça, cette histoire de fous qui produit des bombes faites de petits bouts de haine coincés entre les dents. Alors il va falloir se faire ds bisous, c'est certain, mais il va aussi falloir commencer à trouver un truc, parce que ça suffit, quand même, d'avoir envie de crever comme ça.

lundi 21 mars 2016

Ecran total

Je peine un peu à finir un micro-cycle sur les écrivains au cinéma, mais j'y arrive et du coup, je peux en commencer un autre, qui me taraude depuis un moment - oui, je suis dans cet état un peu sale et pervers où je commence un cycle et j'ai pas fini çui d'avant, ooouh. Voilà.

In a lonely place parle donc d'un écrivain - enfin, de cinéma, hein, pas un vrai - qui a un petit problème avec sa violence - d'ailleurs traduit par Le violent en VF, quelle poésie. Dixon est donc un vieil écrivain à la ramasse, toujours en rade de booze, à écumer des bars à la recherche d'une brave petite à ramener chez lui, mais le pauvre, quand il en trouve, elle veut pas enlever son jupon et se met à parler de bouquins pendant des heures - les gonzesses, franchement. Après avoir mis la petiote à la porte comme un bon malpropre - "l'arrêt de bus est au coin de la rue" - ce pauvre Nixon mate un coup sa voisine d'en face, se branle et au lit. Quelle vie. Tout ça pour apprendre que cette inconnue littéraire s'est fait étrangler sur le chemin du retour. Nixon, ça lui en touche une sans faire bouger l'autre - elle avait qu'à être un peu plus docile, didon. Evidemment, on le soupçonne et évidemment sa belle et mystérieuse voisine, Laurel, l'innocente et accepte de coucher avec dans la foulée - ben tiens.  C'est l'amour fou mais Laurel se pose quand même des questions - et si c'était lui qui avait fait le coup? En plus, Nixon est bizarre - il fout des baffes aux gens comme ça sans prévenir, il cogne des types sur le bord de la route et quand on lui dit qu'on veut prendre deux trois jours de vacances entre copines, il essaye de vous étrangler, pas cool. C'est donc hyper bizarre: c'est un film de suspicion sur le thème "connaissons-nous vraiment l'homme de notre vie" mais en même temps c'est tellement clairement un gros enculé dès le départ, qu'il y a pas vraiment de suspense. En fait. Bon, du coup ça ne parle pas beaucoup d'écriture. Tout ce qu'on sait, c'est que Nixon écrit à la main et c'est bobonne qui tape tout après. Bravo.

Par contre Hammett ne parle que d'écriture et de roman et de film de roman qui romanise le film et cinématographie le livre - tout ça. Dashiel Hammet est un pilier du hardboiled américain des 30's et a donc écrit une chiée de livres qui ont été adaptés. Comme c'est souvent le cas, c'est un style déjà très cinéma dans l'écriture ( forcément influencé par des découpages en plans) et puis comme ça a été beaucoup adapté, y'a un jeu d'aller-retour intéressant dans la forme. Alors quand t'as Wim Wenders qui fait un film sur un écrivain qui écrit des bouquins comme on fait des films et dont on fait des films, fatalement, ça va faire mal au cerveau. En fait non! C'est un joli néonoir, avec des petites touches rétros et des trucs rigolos: Hammett, écrivain, se retrouve coincé dans une intrigue de chinoises qui disparaissent et de vieux qu'on fait chanter. Lui, pas grand chose à voir, si ce n'est qu'on lui a piqué son manuscrit - et que comme il passe un temps non négligeable à s'imbiber, il se rappelle plus trop de ce qu'il a écrit, c'est malin. De fil en aiguille, Hammet devient un petit privé de pacotille, aux prises avec des méchants pas beaux et accompagné d'une belle brune à la peau diaphane et au petit béret - il devient son propre personnage et finit par réécrire son histoire en la vivant. C'est fait dans une esthétique volontairement (?) fake, avec des décors un peu kitsch, un jeu avec l'idée de carton-pâte et de contreplaqué, dans un Chinatown imaginaire. C'est à San Francisco du coup, il y a des escaliers partout et plein de jeux d'architecture avec des montées, des descentes, des recoins et des surplombs, très joli. 

Born on the fourth of July fait donc partie d'une idée à la con - regarder tous les films cités dans le numéro 700 des Cahiers intitulé " L'émotion qui vous hante". Voilà, voilà. C'est pas mon premier Stone, mais j'ai toujours autant de mal et je ne sais pas pourquoi: j'aime le Vietnam, j'aime les 70's et j'ai rien contre Tom Cruise, alors c'est quoi? Je sais pas. Le film n'est pas mal en soi - il parle de la reconversion d'un ex du Vietnam qui a perdu ses guibolles en cours de mission et qui finit par se dire que la guerre, quand même c'est de la merde et du coup se met à militer avec des hippies alors qu'il leur crachait à la gueule 5 ans avant. C'est bien! On suit l'itinéraire d'un pauvre gosse qui comprend pas grand chose à ce qui lui arrive et s'engage un peu comme un crétin brainwashé, comme pas mal de gens finalement, pour se retrouver à 20 piges paralysé sans jamais avoir pu tirer son coup. Pas cool. Je sais pas pourquoi j'ai pas accroché: je trouve ça froid et chaud en même temps, l'impression d'alterner des trucs hypers émotifs Actor's studio puis des passages ultra distants sans empathie, comme si tout se déroulait dans un univers en surimpression - parfois trop près, parfois trop loin. L'époque, les contradictions, la musique  - tout ça est très bien, mais pas l'impression d'avoir pu entrer dans le truc. 

In a lonely place, Ray, 1950
Hammett, Wenders, 1982
Born on the fourth of July, Stone, 1989

dimanche 20 mars 2016

Offscreen

Snif, c'est fini et une fois de plus, j'ai eu plus d'ambitions que de moyens, du coup, j'ai pas vu grand chose et me voilà toute chafouine. Ceci dit, les quelques trucs vus me laissent rêveuse pour un bon moment encore. 

Alors Crumbs, c'était un film qui avait une sacré gueule - genre post-apo science-fi ethiopien filmé dans des décors de fou furieux avec le mot magique ("Tarkovsky") dans la critique. Miam! Alors ça raconte l'errance d'un bossu qui part à la recherche d'une sorcière puis du Père Noël pendant que sa meuf dort dans un bowling abandonné en vénérant Magic Johnson. Dit comme ça, c'est bizarre, mais en fait c'est assez canon: il y a des plans de dingue dans des grandes plaines vides faites de concrétions minérales toutes bizarres, des villes abandonnées, un monde à moitié en train de couler avec des petits objets rigolos qui traînent - dont une très belle collec' de dinos  posés sur des rails. Il y a effectivement du Tarkovsky dans la lenteur des images qui se dilatent dans l'espace, et puis du Jodo aussi, dans les incongrus d'une existence en petits bouts qui collent aux dents. Il y a aussi un super son en grosses nappes épaisses par moments puis en petits  morceaux de nostalgie jazzy, enfin un truc un peu d'un autre monde. Le vaisseau spatial, par contre, heu, oui bon. Et puis le sous-titrage, bon confondre désert et dessert, c'est pas pour faire ma nazi à oreilles de mickey, mais quand même quoi.

Brain damage, je l'ai regardé avec le cerveau dans un état adéquat - c'est à dire en petite purée sans grumeaux. J'ai du coup pas trop suivi tout ce qui se disait, mais j'ai compris quand même - bon c'est pas non plus du Foucault. Il y est question d'Elmer, sympathique petit parasite qui se cache dans le cou des gens et qui leur file du jus bleu qui fait des trucs bizarres à leur cerveau. Elmer est une sorte de marionnette faite avec une chaussette, genre bricolage de fête des mères, et des pitits yeux en boutons cousus dessus. C'est arty. Il est par contre bien dégueu quand il se met à sucer les gens - il ressemble un peu à la limace en caca de Shivers. Par contre, y cause drôlement bien - et  un peu trop. Bon donc, Elmer se met à la colle avec un petit jeune qui va se mettre à avoir des méchants retours d'acide et courir tout nu dans la nature. Pendant ce temps, sa nana se tire avec un type parasite-free - on la comprend - et les anciens proprios d'Elmer se mettent en tête de le récupérer. Bagarre! Bon, je sais même plus très bien comment ça finit pour être honnête, mais une chose est certaine - ça remet les idées en place.

Et puis j'ai fini en apothéose avec le dernier Wheatley que j'attendais avec circonspection mais quand même trop hystérique dans ma tête. J'avais été déçue par A field in England, un film qui ne commençait jamais et  finissait donc à l'avenant. Et puis j'ai revu Kill list cette semaine et je me suis dit que c'était quand même trop l'homme de ma vie. Du coup je l'ai vu en vrai, alors je suis encore toute chose. Mais bon, le film. Alors c'est un beau bordel de film de fou malade, il faut bien le dire. En gros, ça parle d'un immeuble géant plein de gens tarés qui finissent par faire de l'ultraviolence et des teufs de barbares en se mettant de la farine plein le pif. J'ai pas capté tout de suite la référence mais en voyant l'affiche, on peut quand même se dire que c'est largement un hommage en règle à Orange Mécanique: la musique, la décadence, les décors 70's, les pantalons en velours côtelés bruns à patte d'ef et la lutte des classes qui est jamais loin. Il faudrait d'ailleurs vérifier la citation de la fin, mais ça m'étonnerait pas qu'elle soit de cette chère Thatcher. Il y a une superbe construction d'ambiance ultra bizarre mais en même temps très normale, des visions un peu au ralenti d'hôtesses de l'air qui font des chorés, du cul disséminé un peu partout avec une certain désinvolture, des petites anglaises décadentes qui veulent une fessée et des animaux qui en prennent plein la gueule, d'ailleurs, miam. On comprend pas trop comment tout part en couille - coupure d'électricité et prise d'assaut de la piscine - mais en fait on s'en fout: l'idée, c'est ces grands ensembles totalitaires froids qui font des microcosmes toujours à deux doigts de l'implosion sociale avec pas beaucoup de considération pour l'espèce humaine, la dignité et la bonté générale. Les images, c'est toujours aussi beau, calme, élégant; et la bande-originale est juste mortelle. Bref, Ben, je t'aime de nouveau et pour toujours - et même que je vais reregarder A field in England, si ça tombe, j'avais pas bien vu la première fois.

Crumbs, Llanso, 2015
Brain Damage, Henenlotter, 1988
High Rise, Wheatley, 2015

jeudi 10 mars 2016

Ecran total

Pour une fois je vais pas chercher à justifier cette sélection: c'est juste n'importe quoi et voilà.

Je ne sais d'ailleurs pas comment j'en suis arrivée à regarder The town that dreaded sundown, mis à part que ça se passe à Texarkana, ville fascinante dans laquelle j'ai passé une heure coincée à quai en pleine nuit à me demander quel esprit poète avait imaginé un blaze pareil - étant coincée entre le Texas et l'Arkansas, c'est d'une logique implacable - et à imaginer une ville genre Namuxembourg, mais c'est toujours moins classe quand on veut faire comme les ricains, nous autres. 

Donc, le film se passe à Texarkana, ville traumatisée voici 66 (!) ans par un sérial killer dont on a perdu la trace et qui revient, houuu, faire bobo aux petits jeunes qui forniquent en plein air ( c'est bien fait pour eux on va dire). Mais c'est qui qui donc? Une jeunette survivante va mener l'enquête avec un type qu'elle trouve au fond d'un bureau d'archives du genre grand flave mou du genou doté d'une absence à l'écran limite sociopathe - perso, j'avais parié sur lui, mais non. Pendant que les polices des deux états se bouffent le nez et se touchent la nouille, les meurtres continuent avec un plan implacable qui respecte en fait tout simplement le scénario d'un film qui a été fait sur ledit serial killer en 1972 ( et qui existe vraiment!). Un film dans un film, tout ça, woa, ça fait réfléchir dans la tête! En fait pas trop, non. On rencontre par contre des caméo intéressant, dont Anthony "Antwon Mitchell" Anderson en Lone Wolf Ranger (ça c'est du blaze aussi) et Denis " Liz Taylor" O'Hare, la trav' intello d'AHS. C'est rigolo! Son apparition soulève d'ailleurs des questions de traductologie lancinantes: mais quelle est cette traduction du titre du film, là, planquée en arrière-plan?


Allez, on va dire que c'est du créole. Pour le reste, c'est un peu mou, et j'ai même pas vraiment suivi qui était coupable et surtout, pourquoi est-il si méchant? Bah.

Toujours sur le pouvoir du cinéma, Sinister 2 un truc qui aurait mieux fait de rester chez lui, tiens. Échaudée par la catastrophe The Pact 2, j'ai hésité, mais comme la chair est faible, je me le suis collée et le ratage est à la hauteur de mes craintes. Sinister était bien branlé parce qu'il y avait une sorte d'intrigue, de mystère mystérieux qu'on comprend pas. Là, on sait tout dès le départ, c'est donc un peu superflu comme film. Que se passe-t-il donc, dans cette suite? Hé bien, on suit le processus de fabrication des films de torture: comment des enfants fantômes et maléfiques sélectionnent un p'tit gars, lui montrent des snuffs en cachette la nuit dans la cave et lui demandent d'en faire un à son tour et puis il dit oui, mais non, mais en fait oui mais heureusement un flic un peu moisi va sauver tout le monde et waou. On a un peu l'impression de regarder un môme de  6 ans négocier ses heures de télé "Alleeeeez encore un" "Non, ça suffit les snuffs pour aujourd'hui" "Mais t'as pas vu le miiiiieuuuuux" "Non, mais c'est bon, on regardera demain" "Oui, mais non, mais il faut le regarder ce soir, justement parce queeeee" "Bah parce que quoi, mouflet de mes deux? Hein? Scénariste de merde, tu peux me donner au moins genre UNE bonne raison pourquoi on est là à mater des films à la con dans une cave et qu'il faut que ce soit là, maintenant, hum? " *silence, vide scénaristique absolu, le vent souffle dans mon cerveau*. Le truc encore plus fort, c'est que l'arme absolue est ici une caméra super 8: il suffit de la casser pour arrêter le meurtrier. Quand je vous dis que le cinéma sauve des vies - surtout quand il s'abstient, comme il aurait mieux fait ici. Voilà voilà. Les tortures sont relativement les mêmes, avec un penchant pour le paradigme "pendaison": pendus par les pieds, pendus par les bras, pendus sur une croix. La seule non-pendaison est par contre d'une inventivité digne d'une recette de MasterChef: cloué au sol, une casserole retournée sur le ventre avec un rat à l'intérieur et des charbons ardents placés sur le dessus de la casserole (ça donne un goût fumé au rat?). On admire l'effort. 

Heureusement il y Findus et toujours une bonne histoire de prêtres pédophiles et de journaux indépendants qui font la lumière sur tous ces pervers en soutanes. Spotlight délivre ce qu'il promet: un bon petit film sans temps morts, pas trop chiant, sans pathos de fou, avec une résolution mais quand même un peu en demi-teinte, une justice-mais-quand-même-avec-des-questions enfin tout ça. L'histoire est relativement simple: un nouvel éditeur (juif! aux doigts crochus! vénal!) débarque dans un journal de la bien catho Boston pour relever un peu le niveau. Du coup, y s'dit qu'une ville pleine de froqués comme ça, ça doit bien avoir deux trois scandales planqués derrière une porte. D'où enquête diligemment menée par une petite bande de journalistes qui en deviennent tout chafouins - même qu'y arrêtent d'aller à la messe avec leur mamy, c'est dire - qui finissent par mettre à jour le pot-aux-roses. Ça avance au niveau rythme puisqu'on suit trois journalistes en alternance avec d'autres personnages et ce, à la fois dans l'enquête et dans la vie, par des petites vignettes vite fait, des micro-scènes qui replacent un peu chaque personnage dans un cadre concret à échelle humaine - pas qu'un film de journalisme, donc. Il y a le beau Liv "Ray Donovan" Schreiber et le pas content Mark Ruffalo qui a un peu du mal avec son personnage - il parle comme un petit rital de North End, mais persiste à avoir un nom latino et puis il couine un peu beaucoup quand il est mad, mais ne devient jamais vert, dommage. 

The town the dreaded sundown, Gomez-Rejon, 2014
Sinister 2, Foy, 2015
Spotlight, McCarthy, 2015

mardi 1 mars 2016

Redneck total

Bon avouons-la, l'idée de ce micro-cycle ne vient pas directement de moi, mais d'un sympathique B to Z au titre alléchant de "Rural terror". Une grosse attaque de flemme m'empêcha de m'y rendre, mais foutre! J'étais déjà tellement mouillée dans ma tête à l'idée de ces films qu'ils ont l'air super chelou que je me les procurai fissa et en route pour un weekend à la campagne. 

Wake in fright est (apparemment) un film culte australien - pour moi, c'est surtout un film australien quoi: y disent "mate", on pige quenouille à leur accent et y butent des kangourous quand y s'ennuient.
dead as a kangoo
Bon. Mais encore. On y voit un jeune instit' gaulé de sa race, blondin comme un petit surfeur bien miam, qui quitte son poste au fin fond de la cambrousse pour partir à la grande ville rejoindre sa surfeuse de copine. Faisant halte dans une ville de bons vieux rednecks, il commence par ricaner des mœurs étranges de ces gens sans dents qui se nourrissent de bière, puis il décide de rigoler un coup et crame toute sa tune en pariant (sur des pile-ou-face, quand même, grand moment de cinéma suspense). Comme il a plus de sous, il continue à se mettre la tête avec des gens qu'ont des tronches pas nettes en se disant que c'est une bonne idée (heeuu). De cuite en partie de chasse sauvage, notre apollon finit par n'être plus qu'une petite chiffe molle imbibée qui dort dans son pipi. Heurk. Il décide de réagir, mais arrivera-t-il à quitter cette ville mauuuudite (*mouahaha*). C'est donc pas vraiment un film d'horreur et même pas une série Z, puisque c'est très bien foutu, avec une progression bien lente et vicelarde dans la violence virile de bouseux en zlip, comme voir un (beau) camion s'écraser au ralenti en sirotant son petit thé. Finalement, c'est quasi du Southern Gothic, avec la même idée d'une zone in bumfuck nowhere, avec ses lois et ses codes, et visiblement pas beaucoup de dentiste. C'est aussi le premier film dans lequel est crédité un kangourou dans le rôle du fighter. Un oscar pour Nelson, un oscar pour Nelson!



Dans la suite directe, The reflecting skin est également filmé dans un espace paumé, hors du monde, limite hors du temps, avec des gens qu'on dirait tous des mennonites et avec des drames plein de lenteur zet de grâce. Ici, il s'agit d'un petiot à l'imagination galopante qui pense que la vieille anglaise d'à côté est un vampire - elle fait un peu sa Tilda dans Only lovers.... A part ça, tout va bien: des types inquiétants se promènent dans une bagnole rutilante et caressent les joues des petits garçons, son père s'immole à la pompe à essence et ses petites potes disparaissent les uns après les autres. Entouré d'une troupe d'adultes patibulaires tous à moitié dingues - sa mère qui le torture à l'eau la nuit, son frère qui se tape un vampire, le shérif qui lui parle de son œil en moins, enfin, normal quoi - notre cher bambin finit par devenir pote avec un fœtus momifié (enfin un truc du genre). Tout ça donne un film bien bizarre aux intrigues parallèles - mais qui se rejoignent à l'infini, comme on le sait - dans une ambiance lente, météorologique, et carrément American Gothic pour le coup.


Y'a pas à chier, c'est vraiment beau, ultra photographié et léché dans la recherche de cadres, parfois un peu fatiguant par contre dans les dialogues - genre un peu trop d'hystérie en jachère, de folles planquées au détour de chemin qui caquettent (toujours pas compris cette scène) et de grenouilles qui explosent. Parce qu'un peu comme Wake in fright, y'a de la castagne de nature animale qui laisse un peu rêveur parfois - la seule violence directe du film en fait. Bah, on s'amuse comme on peut. 

Tout ça est très cohérent, mais comme j'étais en mode "in da wood" depuis la semaine dernière, j'ai enchaîné avec Cabin Fever, encore un petit bijou campagnard de ce cher Eli Roth, qui aime décidément bien partir filmer on location, le fourbichou. Bon, celui-ci par contre est un bon Z assumé jusqu'au bout. Placé sous le patronage de Deliverance (aheum) dès le départ, rien ne nous est épargné: redneck en chemise à carreaux et bretelles, fusil à pompe, shérifette sexy/trashouille et enfant à masque de lapin genre Gummo bricolo. Tout ça pour raconter une histoire somme toute banale, de 5 sémillants jeunes gens, plein d'espoir et d'hormones en folaïe qui partent pour un petit weekend à la campagne et qui se font estourbir par qui donc? Hé ben par un méchant virus qui bouffe la peau et fait des trous pas bien beaux dans leurs jolis abdos. Comme c'est beau comment je cause parfois. Bref du coup, virus, contamination en série, tentative de quarantaine dans l'abri de jardin qui tourne à l'immolation et séance de rasage qui fait une très mauvaise pub à Gillette Venus. Là-dessus, le redneck n'est finalement qu'un accessoire sympa, certes, et bien jovial, mais bon. Y paraît qu'il y a deux suites: ô joie!

Wake in fright, Kotcheff, 1971
The reflecting skin, Ridley, 1990
Cabin fever, Roth, 2002