mardi 20 mai 2014

Ecran total




Poupoupidou est un film qui raconte une enquête sur le meurtre d'une mini-star d'une petite bourgade du Jura, perdue sous la neige aux confins de la frontière suisse. Un meurtre inexpliqué, une blonde que tout le monde adorait, un village paumé à la frontière et livré aux éléments naturels, un cadavre trouvé dans une zone-frontière floue.... Bingo! C'est Twin Peaks en fait! Je ne sais pas si c'est fait exprès, mais sinon, c'est vraiment beaucoup de coïncidences: entre l'inspecteur (qui prend ici la forme d'un écrivain à la recherche d'inspiration) dirigé par ses intuitions et bourré de pouvoirs bizarres qui le mettent à part, l'ado ténébreuse de l'hôtel qui tente de séduire le bel étranger, la psy qui garde des cassettes audio de sa patiente, l'implication de personnages éminents avec chantage à la clé, et surtout, surtout, les journaux intimes grâce auxquels on remonte le fil: on peut difficilement parler de hasard. Cela dit, ça ne fait pas du tout redite, puisqu'il y a le deuxième fil, celui de Marilyn et des millions de clichés qui gravitent autour de cette image de l'Amérique, un peu naïve, avec ses pompistes en combinaisons, ses bowlings et ses Beach Boys. Il y en plus une série de détails rigolos: la télé locale ("Franche-Comté, la télé bien affinée"), des boîtes de fromages Warholisée, et les titres des livres du James Ellroy wannabe qui mène l'enquête ("Une chatte andalouse", arf).

J'ai ajouté Serpico à ma bucket liste et complètement oublié de quoi il s'agissait- je n'ai donc toujours aucune idée de pourquoi il fallait que je le regarde, mais je suis bien aise de l'avoir fait. J'ai récemment fini (un peu dubitative) The Chicago Code, alors les trucs de pourris, c'est dans l'air. Frankie ( ou Paco pour les intimes) est un flic qui veut changer des trucs: il veut pas se couper les cheveux, sous prétexte que ça aide ses couvertures ( pas faux d'un point de vue capillaire), refuse de taper sur des prévenus et ne prend pas de sous. On sait dès le début que ça va mal finir, puisque le coup de feu a lieu au début du film, mais on voit comment ça en arrive là. Renvoyé de bureau en bureau, transféré dans des endroits toujours pires, le pauv' Franky ne va pas à Hollywood, mais bien direct en enfer: des responsables qui restent muets, une justice qui évite de se mouiller, l'attente insoutenable et absurde d'une enquête qui n'arrive jamais; tout ça et sa vie sentimentale qui part en couille, c'est pas jojo d'être honnête à New-York dans les 50's. Pacino est remarquable (même si y'a parfois un peu d'exagération au niveau des costumes à base de gilet en alpaga péruvien), sous ses multiples chapeaux et bonnets, de plus en plus pâle, vidé, parano et nerveux. 

Amerika, rapports de classe est le premier film de Huillet/Straub que je vois. J'avais donc un peu peur, vu la réputation méga-intello que se traînent les cocos, mais je suis agréablement surprise. N'ayant pas lu le livre, je peux difficilement évaluer la qualité de l'adaptation, mais pour avoir un peu tâté Kafka, je dois dire que ça correspond parfaitement à l'univers de l'auteur tant du point de vue visuel que du point de vue de la réalisation. Il y a cette espèce d'écriture sans qualité qu'on retrouve dans la sobriété des décors, des plans, des personnages, de la direction d'acteurs hors de tout pathos et des situations immobiles, figées dans un récit parfois trop long, qui se perd en détails inutiles. Le héros, Karl, est une sorte d'homme sans épaisseur ni profondeur, sans passé et qui ne semble avoir aucune prise sur son existence, aucun pouvoir de décision, balloté d'un endroit à l'autre sans mot dire. Les diverses relations dans lesquelles il se retrouve toujours un peu malgré lui embourbé le rendent plus misérable qu'elles ne l'aident; finalement, il sert plus de figure muette qui écoute les confessions des uns et des autres sans broncher et sans que personne ne lui demande vraiment de se raconter à son tour. Les conversations sont d'ailleurs souvent filmées sans contrechamp: une personne parle (à une autre, mais ça pourrait tout aussi bien être à personne), éclairée par une lumière braquée sur elle, dans un dispositif parfois à la limite de l'interrogatoire. Des interrogatoires, il y en a beaucoup: on interroge Karl à tout va, sans jamais lui demander rien d'essentiel, et en refusant toujours de revenir sur l'acte d'accusation - impossible à dire, trop obscène. L'insistance de quelques plans au-delà d'une durée "normale" contribue à ce creux dans la parole, ce silence qui gouverne tout ce qui est dit en sous-main. L'image choisie pour l'affiche du film est au demeurant celle qui m'a le plus marquée dans l'ensemble: elle résume bien ce bâillonnement.

Klassenverhältnisse 1

Poupoupidou, Hustach-Mathieu, 2011
Serpico, Lumet, 1973
Klassenverhältnisse, Straub/Huillet, 1984

lundi 19 mai 2014

It's all so quiet....shhhh...shhhh.

I sometimes feel like I'm listening to a new Thee Oh Sees album every other month. It's not far from being true, these guys are stakanovist AND punk at the same time, a pretty neat combination. 
But for once, Drop is giving me the feeling something is changing. I still don't know what to think about this (and I wish somebody would tell whether to love it or burn it to the ground), but I'm confident the next album, presumably to be released within 6 months, will give me an answer. In the meantime, let's try to figure this Drop thing out.

It starts very normally, with a weird Penetrating eye piece: not only the title (I hate violence against eyes in general) but the mayhem of guitars and distorsions sounds bursting at once after a sweeet little tune played on a oldschool keyboard seems highly Theeohsees-esque. This and the hypnotic chanting, rendering everything blurry as to where the sounds stop and the music starts.



We then go to Encrypted bounce, also a good ol'classic garage piece, with half-sung, half whispered lyrics and a bass line in the pure style of what can be found on The Master's bedroom. Here and there, crying guitars are shattering the soft surface of sound and creating little messy areas of caterwaul like contemplation. 



Put some reverb on my brother, apart from being an awesome title, is starting fine but growing into something much harmonic, very 70's like and making a soft, but indubitable transition to something much more tamed and easy on the ear than what I'm used to.


Camera (Queer sound) is in this regard rather normal: guitars working together, harmonies all over the place, choir singing in the back. King's nose is then almost beatlesy.



The lens is letting us go on a peaceful tune, backed by a deep cello bass and next to no other instruments then an extra brass during chorus and a little trumpet line at the end. Softspoken lyrics about -if I'm not mistaken- being together ( well ariving at the same time) make it all so smooth it's kind of scary.



Why so scared then? The same way you get scared when knowing that somewhere there's a monster in the trunk: the few silent minutes before it comes out are when the absence of noise is daunting, sending chills down your spine and the more it lasts, the more you expect the next BANG to be a horrifying one. I will sure be very careful with the next TOS record I get my hands on. Might be bloody.

dimanche 18 mai 2014

Ecran total

J'ai finalement vu Casablanca, après en avoir lu et entendu beaucoup de choses - en secret, j'ai passé le film à attendre le dernier plan brumeux du sacrifice du héros maudit en forme de rédemption express. J'avais d'ailleurs déjà entendu tellement de fois le nom de Viktor Lazlo que j'étais persuadée que c'était un personnage historique. Voilà ce que le cinéma fait à mes connaissances historiques déjà vagues. Je commence à apprécier de plus en plus Bogart dans ses rôles de méchant-mais-pas-trop, avec sa ptite moue de côté et ses bourbons. Pour une fois, on le voit dans une scène plutôt intense de mélancolie alcoolisée, infiniment triste et hors de tout second degré. C'est surprenant et beau. La situation géopolitique bizarre de cette région durant la deuxième guerre mondiale (+ mon histoire lacunaire mentionnée plus haut) laissent libre cours à une série de rebondissements ennemis/amis ainsi qu'à des petits outburst de fierté nationale (mal placée?). Il y a aussi cette ambiance de film d'espionnage tout en clair/obscur (comme les personnages et leurs motivations, mouiii).

C'est un des derniers du cycle Ciao America, qui reprend une série de film des 60-70's illustrant la rupture dans le cinéma américain, et je commence seulement à  comprendre ce qui change vraiment - aussi parce que j'ai relu la fin de l'Image-Mouvement. En y réfléchissant, j'aurais dû garder The last picture show pour la fin, ça aurait eu plus de classe, mais j'suis trop rebelle. Le film raconte la vie d'un village au Texas, un truc avec un cinéma, un diner et une pompe à essence. Gravitent autour de ces lieux des personnages un peu paumés - un père avec son gamin simplet, une paire de petits jeunes entre le lycée et la suite, une ouvreuse/caissière de cinéma, une femme de coach en pleine midlife crisis. Des relations se font et se défont, parfois sur des malentendus, parfois juste sans faire exprès et la continuité d'une vie sans aspérités finit par partir en vrille et se solder par la mort cruelle, injuste de l'observateur innocent et muet de cette désintégration. C'est plutôt pessimiste quant à ce que l'avenir nous réserve, et vu l'époque, ça ressemble un peu à un coup de semonce à l'optimisme des 60's et ses chevelus trop cool. 

Les petites marguerites (Sedmikrásky) fait partie des films qui ont marqué la nouvelle vague tchécoslovaque, avec un tas d'autres films que franchement je ne connais pas. Mais celui-là, je le vis. On reconnaît bien une série de motifs de l'époque - même si elle ressemblait à quelque chose de radicalement différent de ce côté là du monde: le besoin d'une certaine légèreté dans les rapports au monde et à la vie, l'errance pour elle-même, sans vraiment de but autre que sa propre immobilité (on ne va pas vraiment quelque part), la revendication d'une forme nouvelle, la jeunesse comme centre d'attention. Il y a beaucoup de choses vraiment réussies, surtout dans les expérimentations graphiques qui arrivent à ne pas transformer le film en truc arty impigeable, et quelques scènes en mode slapstick vraiment chouettes. Par contre, j'ai du mal avec l'étiquette "film féministe". Je trouve pas vraiment que ce soit un film à la gloire de l'intelligence des femmes.

The fruit of paradise ( Ovoce stromu rajských jíme) est un autre film de Chytilová, un peu moins jouasse. Il y est question d'un triangle amoureux entre Eva, le Diable et Jozef (confusion des générations, bonjour). Au seuil du film, un prologue d'une quinzaine de minutes d'images en surimpressions montées les unes aux autres façon slow motion, avec une partition classique chorale de la Genèse fait entrer dans le film par le biais des éléments naturels pris dans une matérialité plastique plutôt bien rendue: les surfaces, les aspérités, les creux et les bosses, le liquide, le solide et l'entre-deux. On est ensuite subitement face à un couple qui fait la sieste sous un pommier. A partir de là, c'est une partie de cache-cache entre Eva, son désir et son mari. Difficile à résumer, on voit surtout une série d'épisodes, certains drôles, certains moyens, certains carrément abstrus. On retrouve plein de symboles, de références bibliques, parfois trop chou - le signe de la bête, c'est un chaton mignon. Visuellement, ça fouille, ça fouine et parfois ça trouve: des plans géniaux d'un jardin d'Eden hallucinant, des décors naturels rendus baroques et toujours des images coupées, montées, inversées, triturées à l'infini.

Casablanca,Curtiz, 1942
The last picture show, Bogadnovitch, 1971
Sedmikrasky, Chytilová, 1966
Ovoce stromu rajských jíme, Chytilová, 1970

mercredi 14 mai 2014

Tiens, vlà la pluie...

Aujourd'hui il pleut. Une bonne grosse pluie bien pourrie, celle dont on voit pas le bout, qui semble s'épaissir à chaque instant, creuser des nouvelles flaques à des endroits pourtant plats et qui transforme la ville en succession de rivières invisibles en temps normal. Une putain de pluie qui fait peur à voir, qui devient un murmure de fond continu et qui accroît, aiguise les bruits de la rue.

Des pluies comme ça, bizarrement, ça me plonge dans un état perplexe. J'ai grandi avec un père agronome, que j'ai souvent entendu prononcer la phrase " C'qui pleut aujourd'hui, ça pleuvra pas demain". Donc toujours eu l'idée vague d'une certaine quantité de pluie à tomber qui, une fois épuisée, devrait se tarir. J'aurais dû apprendre, 23 ans en Belgique, que la pluie n'a jamais réellement "fini" de tomber, que s'il existait ne fût-ce que la possibilité d'un quota pluvial à liquider, celui-ci n'était sans aucun doute pas belge. 

Mais non. Alors les jours qui commencent sous la pluie, j'aime ça. Je suis au fond de mon lit, j'écoute, j'attends. Sortir sous la pluie, ça me fait ni chaud ni froid. Je mets mon imper, je m'équipe, je vis ma vie. Mais quand ça dure. Quand à midi il fait gris comme à 16h en hiver. Au fur et à mesure de la journée, je me poste à la fenêtre et je regarde, anxieusement, la pluie qui ne cesse pas, le ciel qui n'est toujours pas vidé. Et quand il faut allumer les lumière à 17h parce qu'on n'y voit plus rien, je commence à douter. Et si ça ne s'arrêtait JAMAIS?


Pour tout le monde, il pleut. Pour moi, c'est à chaque fois une sorte de découverte ontologique: celle de ma propre finitude, de ma propre dissolution dans l'illimité. De ma propre disparition sous des rideaux compacts de trombes dévalant du ciel. 

mardi 13 mai 2014

Brazil (1985)

A pas mal d'égards, Brazil est un peu LE film dystopique par excellence: il englobe une série de thèmes, évoque un ensemble de questions et donne une réalisation plastique très complète d'un univers complètement autre tout en étant terriblement nôtre.

En dehors des évidentes thématiques contre-utopiques (la bureaucratie toute puissante, l'administration tentaculaire, le côté aveugle et arbitraire de la mécanisation des relations humaines) et d'une ligne narrative plutôt classique (un type appartenant au système finit par s'y opposer à la suite d'une série de circonstances fâcheuses, d'un enchaînement à la hauteur de l'absurdité générale qui règne et surtout, surtout, d'un amour immémorial retrouvé), c'est surtout le côté plastique qui m'a le plus touchée cette fois-ci.

D'abord, il y a des tuyaux, littéralement partout: dans chaque pièce, raccordés à chaque machine, serpentant sur le sol attachés à des aspirateurs géants, envahissants progressivement l'appartement de Sam et même dans la scène de fuite, entassés le long d'un mur qui permettra à Sam de s'enfuir par une porte dérobée. 

Les tuyaux, certes, mais aussi des machines, bizarres, avec toute une mécanique à l'air, jamais de capot qui cache, toujours des petites constructions, à tendance organique, avec des petites têtes, des petites membres, pas loin des vision bizarres du Festin Nu. La respiration de l'air conditionné et ses bruits d'estomac va dans ce sens. Les machines sont aussi des petites parties d'un ensemble bien huilé, d'une mécanique universelle qui organise le temps - pas loin de Tati, par exemple dans la scène de réveil - et l'espace: tatiesque aussi, la scène du bureau qui se déplace (le ridiculously tiny office de Ted?).

Des mini-machines, des mégas-tuyaux et tout ça dans des décors vertigineux, des gratte-ciel constructivistes en plongé/contre-plongé, entre lesquels serpentent les voitures et s'envole le plombier anarchiste. Je n'avais jamais remarqué à quel point les décors semblent sortir d'une scénographie d'opéra: surtout dans les scènes oniriques, où on est pratiquement dans du théâtre de mime.

Il y a enfin la série de déformations: celle des machines, déjà mentionnée, celle des décors, démesurés et celle des visages: du visage de la mère, qui passe par tous les états, au masque de tortionnaire chinois, en passant par les monstres chuckyesque des rêves de Sam, tout tourne autour du difforme, mais pas au point d'être inhumain: c'est le petit écart à la réalité, le pas en dehors du normal qui est intéressant.

Après il y a en vrac: un ministère qui s'appelle le M.O.I., des policiers qui répètent des chants de Noël, des ouvriers métallos qui jouent au volley-ball, un plombier qui disparaît étouffé par trop de formulaires et un conseil: ne jamais se foutre du petit personnel. C'est finalement lui qui vous mettra dedans.


dimanche 11 mai 2014

Ecran total

J'avais décidé de finir Moby Dick avant de m'attaquer au film, mais je me traîne un peu alors tant pis pour les spoilers. Vu le style circonvolutionniste du bouquin, on pouvait s'attendre à une adaptation plutôt libre (ou bien à un film-fleuve empêtré de digressions): ici, Huston a réduit et reformaté l'action (ouf) et en a gardé un film somme toute bien foutu, qui ne spoile finalement rien du livre. Quelques passages marquants sont repris tels quels, comme le prêche du prêtre en début de film - avec un Welles étonnant dans une chaire de vérité maritime


et quelques autres monologues d'Achab; une partie du texte est reprise via une voix off plutôt classique. Pour le reste, c'est un film d'aventure à l'ancienne, même s'il se termine mal: le sauvage Quee-queg reste mon personnage préféré et visuellement très réussi, les  vues vertigineuses du mat font mal au coeur et la longue scène d'attente de la baleine blanche est extrêmement bien faite, avec un petit côté hitchkockien en prime.

Je ne sais pas pourquoi, mais je pensais que Robocop était joué par Schwarzenegger, du coup j'étais un peu confuse. J'ai vraiment adoré le film pour une série de raisons: on y retrouve quelques acteurs de Twin Peaks, dont Ray Wise et Miguel Ferrer, il y a des moments de robotiques vraiment mignons (le gros robot pataud qui n'arrive pas à descendre les marches parce que ses pied sont trop gros) et l'une ou l'autre phrase à retenir (Ferrer en pleine séance de swag avec deux putes "Ooooh, being smart is sooooo sexy"). Le robocop est ce qui m'a le plus étonné, puisque je m'attendais à un truc bourré d'effets spéciaux tout pourris et au final, c'est un robot plutôt crédible, avec des mouvements super souples, sans être tout à fait humain et puis toute une histoire d'humanisation progressive qui est assez chou. J'aime bien le concept de pouvoir se dévisser les boulons des tempes.

Tales of ordinary madness est le premier livre que j'ai lu de Bukowski et je ne savais pas qu'il en existait une adaptation. Je me suis donc ruée pour la voir et je crois que je me suis rarement autant fait chier devant un film. J'adore Ben Gazzara, mais je l'attendais en mode Cassavetes et il est finalement un peu soûlant avec son petit sourire placide de loser résigné: trop beau, trop lisse, sans aspérité. Je ne commente pas sur Ornella Mutti, je n'ai toujours pas compris ce qu'elle foutait là. Le cadre, les décors fonctionnent bien avec l'univers bukowskien, rien à dire non plus sur les entremêlements d'histoires (à la base, c'est plutôt un recueil de nouvelles qu'un roman), mais la réalisation foire dans les grandes lignes. C'est mou, ça n'avance pas, et si le but est de montrer l'autodestruction tranquille du vieux Hank, pas de problème, mais alors pourquoi ces violons ridicules quand vient l'heure d'être triste?  Dans l'ensemble, trop lisse, trop propre, un peu dans un esprit antonionien qui n'arrive même pas à être beau. Quelques personnages secondaires sauvent le truc: la blonde hystérique de l'arrêt de bus, la grosse en chaleur sont autant de créatures féliniennes qui auraient dû être le centre de cette errance plutôt qu'une minaudeuse en pyjama qui fait des mines quand on la nique. Bah.

Moby Dick, Huston, 1956
Robocop, Verhoven, 1987
Storie di ordinaria follia, Ferreri, 1981

lundi 5 mai 2014

Der amerikanische freund

If you hate lazy fuckers backpacking around Europe like it's the ultimate trip, trying to pronounce local names with an unbearably lousy accent and being all offended at the fact that not everyone is understanding their stupid gibber-jabberish sort of english, this movie is (kind of) for you. 

Two friends set out to go on a round-the-globe trip and, of course, to document everything (like it's really an original and never-done-before kind of thing). Unfortunately, after getting laid in Paris (that's apparently all we do down here: getting drunk, having philosophical conversations about life and drinking wine late in the night; sure, we never work or do anything that's useful) one of them become sick. Got what was coming, I reckon. So he starts to do strange stuffs: some cool (like jumping super-high and breaking rocks, though I fail to see the use for that except in Europe, where we don't do shit anyway) some weird (puking like on a permanent springbreak binge) and some downright uncool ( burning in the sun and having his eyes poping out of his head). 

Instead of going to a doctor (dude! free healthcare!) they draw the conclusion that he's simply turning into a supernatural creature (I'm not gonna say which one, so as not to spoil eventual future viewers suprise). From that point, it pretty much degenerates into a kind of horror road-trip back to Paris with a super violent ending.


No, but seriously, I like to tease and deprecate my fellow Lonely Planet people, but it's just tough love. Same goes for the movie: it's actually not bad, and the hand-held camera which can be so annoying in the genre doesn't go overboard. Some of the nightvision shots are really creepy and the transformation process is extremely well put. There's even a bit of ontological questioning at the end (between two frantic slaughters). Not bad at all.

dimanche 4 mai 2014

jeudi 1 mai 2014

Loin du Vietnam (1967)

Dans ma série de Resnais, j'ai vu Loin du Vietnam, un film vraiment étonnant qui m'a fait penser au Fond de l'air est rouge. D'une part parce que Marker y participe et d'autre part, parce que ça me semble assez typique d'une certaine naïveté des gauchistes occidentaux par rapport à une série d'événements qu'ils comprennent avec un filtre romantique qui a parfois tendance à décevoir une fois la lumière faite sur ce qui se passe vraiment. Les différents segments se valent en termes de qualité, mais il y en a trois qui ressortent. 

Le segment de Resnais présente un artiste français qui évoque cette prise de parti des intellectuels européens lors de la guerre du Vietnam sous forme d'une série de questions que je n'avais jamais entendue formulée avant (sauf dans La guerre est finie): Pourquoi prendre parti? Pourquoi cette guerre-là en particulier? Que défend-on vraiment? N'est-ce pas un confort d'intellectuels que de pouvoir choisir ses causes politiques? Est-ce que ce n'est pas un luxe de nos sociétés que de se mêler des conflits des autres, quelle que soit la position qu'on défend? Le tout sous forme de long monologue, qui ne réduit vraiment pas la question à l'une ou l'autre position, mais renvoie dos à dos les deux. 





L'autre segment est celui de Godard, qui est plutôt barbant du point de vue du récit (on l'a pas laissé filmer à Hanoi, le pauv'chou) mais visuellement terriblement réussie: on le voit assis derrière une énorme caméra chipoter aux boutons, allumer, éteindre, faire tourner les molettes de direction et je ne sais pas si c'était l'intention, mais c'est hypnotisant, limite sensuel à certains moments. 

Le dernier segment qui m'a frappée est celui de William Klein, qui montre une série d'images des manifestations aux USA, sous forme de "no comment". On prend la mesure de la polarisation au sein même de la société, même si je soupçonne qu'on ait choisi les anti les plus virulemment bêtes, procédé qui me dérange un peu (pour l'avoir beaucoup vu dans les médias français à la suite des manifestations contre le mariage gay, transformant le travail journalistique en chasse au plus gros intégriste et l'analyse politique en micro-trottoir). Il y a par contre ce fameux "A parade is a parade is a parade", lâché par un officiel et sur l'origine duquel je me pose des questions: j'ai déjà entendu cette phrase citée en référence, mais du coup, est-ce en référence à ce film ou le type la cite-t-il lui-même? Et si oui, d'où vient-ce?

Loin du Vietnam, Resnais, Varda, Klein, Godard, Ivens, Lelouch