mercredi 24 mai 2017

Ecran total

On a souvent dit que les psychopathes étaient ceux qui avaient les meilleures chances d'être super successful – il semble aujourd'hui qu'il suffise d'être simplement demeuré complet et de n'avoir aucun surmoi, comme le prouvent ces deux exemplaires de grosses merdes. Dès lors, que faire de votre existence si vous êtes un gros sociopathe? C'est simple comme une inscription chez Actiris: recyclez-vous! Devenez mathématicien brillant, prisonnier flippant ou encore charpentier gluant!

Coucou
J'avais déjà vu Pi mais je ne m'en rappelais guère – probablement parce que je n'avais rien pipé au film, si ce n'est que le monsieur a beaucoup mal à la tête et un gros complexe de Fibonacci. En le revoyant, on voit mieux d'où viennent certains tics de montage de Requiem et surtout les thématiques qu'on retrouve un peu partout chez Aronofsky – paranoïa, obsession, somatisation et le classique je-suis-trop-génial-pour-être-normal-et-j'en-souffre-sortez-moi-de-là. Pi raconte donc l'histoire de Max, mathématicien/trader qui fait joujou avec son ordinateur trop vintage (il est un peu hipster) pour essayer de trouver des pattern dans les chiffres. Pauvre Max, tout le monde le fait chier – entre des kabbalistes fous qui font de la topologie de la Torah, des responsables RH à grosses épaulettes qui font du recruting sauvage et sa gentille voisine qui le gave de samosa, pas moyen de réfléchir peinard. Vient un moment de crispation où tous ces signes finissent par faire trop pour la tête à Max qui commence à partir en vrille. Belle descente aux enfers qui se termine par un splash sur le miroir avec un putain de rythme, des répétitions en boucle d'images/séquences, des plans très près, très rapides, dans du N/B bien granuleux comme on aime. Parfois un peu hystéro dans le jeu peut-être.

les
Bronson est un truc trouvé par hasard (je crois que j'ai confondu avec Manson en fait) mais que j'ai surtout regardé pour le très succulent Hardy qui passe une bonne partie du film un peu voire beaucoup à poil (film carcéral oblige). Hardy est ici Bronson, prisonnier rosbif super célèbre (ha?) à grosse moustache et psychotique à l'avenant. Raconté comme un one-man show avec flash-back sur un parcours un peu, disons, chaotique, on suit l'histoire de ce type tout chelou – de petit braquage à prison en passant par l'asile, c'est bath. J'avais juré de ne plus rien regarder de Refn après la bouse de Neon Demon mais bon, je me suis dit "Hardy, petit" et voilà. Au final,, c'est pas trop mal, très Drive musicalement, très clippé visuellement – grand espaces vides, plans immobiles, personnages en mode automatique, travail sur la composition des plans comme des tableaux – et ça reste regardable voire joli parfois. Au niveau du jeu, pas mal foutu, assez convaincant niveau grand malade – le dispositif "théâtre" est par contre un peu lourd (on voit pas trop le rapport avec le fond, si ce n'est la manière très immobile de filmer. Mais alors, on aurait même pu aller vers une scène d'opéra (genre)). Bref. C'est pas mal, c'est une histoire et une info intéressante à avoir (il y a des gens tarés en prison et ils ont des belles rouflaquettes).

cinglés!
Le dernier taré est le taré mystère de Savage Weekend, super-slasher/triangle amoureux, à mi-chemin entre Antonioni (pour les couples qui se font et se défont) et Tobe Hooper (pour les tronçonneuses et outillages divers). Marie, fraîchement divorcée, se tire en weekend avec son mec, sa sœur et son pote gay. Des trucs un peu sexuels se passent avec des types locaux, qu'on comprend pas bien et y a du fricotage dans les buissons. Il y a aussi une autre histoire, celle d'Otis, réparateur de bateau à l'air bien cinglé qui semble vouloir se venger d'un truc  (mais quoi?) sur quelqu'un (mais qui?). Tout ça finira dans le sang mais pas forcément comme on croit. C'est pas mal car pas forcément que du gore (même s'il y en a quand même, hein). Ça cherche à créer des tensions à d'autres niveaux notamment entre habitants de la ville et pauvres ruraux, ainsi que des trucs qui enrayent un peu la mécanique des rapports à un niveau amoureux chelou. Jolie idée de scie circulaire et belle attaque à la tronçonneuse.

Pi, Aronoksfy, 1998
Bronson, Refn, 2008
Savage weekend, Paulsen, 1979

samedi 20 mai 2017

Ecran total

Histoires de famille, trucs cosmiques et gros comiques; n'importe quoi et dans le désordre.

Je poursuis ma découverte de Dolan et je suis déjà un peu déçue (bouh) par Juste la fin du monde qui me laisse un peu meh. Ça raconte le retour difficile de Louis, écrivain réussi dans une famille un peu plouc qu'il pensait avoir laissée derrière lui. Retour d'autant plus compliqué qu'il est le dernier puisque Louis va mourir (nous aussi, et on n'en fait pas une tartine pour autant, hein). 12 ans de silence, de frustrations, de questions sans réponse et de cartes postales comme des petits cailloux: c'est pas grand chose et difficile à dire en 2h. Tout est un peu hystérique, criard, tendu et parfois difficile à regarder. Il y a ce style de Mommy qu'on retrouve dans la surenchère qui laisse parfois un peu dérouté mais avec une écriture différente, théâtrale puisqu'il s'agit d'une adaptation d'une pièce de Lagarce, texte éponyme que je n'ai jamais lu mais où on reconnait le dramaturge à cent à l'heure, que ce soit dans la forme ou dans le fond. C'est beau à lire mais parfois dur à entendre, ici, ça tire un peu, ça pèse parfois. C'est aussi très beau à plein de moments - en fait c'est difficile à comprendre, une émotion compliquée à décrire qui plane comme ça. Photographie géniale par contre, avec parfois ce côté clipesque de sale gosse. Beau mais aussi.

Famille pourrie, c'est par ici: Maps to  the stars qui me réconcilie un peu avec Cronenberg que j'avais lâché après l'adaptation bousesque de Cosmopolis - pas tenu plus d'une demi-heure - et qui refait un truc un peu bien: y a des déformations corporelles, des trucs organiques qui pointent sous les névroses même si ça reste un peu fade par rapport à ce qu'il a pu faire. L'intrigue est difficile à résumer sans trop en raconter: Agatha débarque à Hollywood pour y faire on se sait pas trop quoi et son monde rentre en collision avec celui de quelques exemplaires d'humains névrotiques qui y vivotent - actrice vieillissante, gamin grandi trop vite, mère maquerelle et psy tendance pipeau/new age. Tout ça n'est pas par hasard car il plane une histoire de famille, de feu et de secret honteux qui se vit dans la chair cramée. C'est parfois un peu lourd, parfois énervant, mais globalement ça tient la route et c'est un bel ensemble de cinglés, plutôt joli à regarder. 

Encore un peu plus près du ciel et de la perfection: Paradise/Hope, troisième volet de la trilogie de Seidl, observateur génial de la difformité, des anormaux, des trucs chelous un peu gluants qui traînent dans les coins de la conscience collective. Ici, on suit Mélanie, petite boulotte de 13 ans envoyée en camp d'amaigrissement au milieu de la verte Autriche pendant que sa mère se tape la cloche au Kenya. Le reste est une tranche  de vie d'une adolescente banale en somme - amour un peu incestueux, première cuite, discussion sur la pipe (pour ou contre et quoi faire après) et coup de fil en détresse à Môman (qui visiblement s'en cogne complètement). C'est toujours sublime dans l'image, un travail sur des plans immobiles, découpés à la hache avec des lignes partout, souvent verticales, un travail d'architecture de chaque plan qui se fait sans donner l'impression de poser. Pas de commentaires, peu d'explications comme souvent, pas de bande-son pour savoir où on en est dans l'émotion, c’est de l'enregistrement qui se fait dans du frontal parfois à la limite du malaise tellement c'est complètement freak ET normal en même temps, en jouant sur ce petit point de réel qui perce l'image et qui vient titiller l’œil. Voilà quoi.Mention spéciale au mulet du prof de gym: Monsieur, votre courage vous honore.
Das groß mulet
Juste la fin du monde, Dolan, 2016
Maps to the stars, Cronenberg, 2014
Paradies: Hoffnung, Seidl, 2013

vendredi 19 mai 2017

Chienne de vie

C'est bientôt  la période magique du festival du chien de Yulin au cours duquel des chinois sanguinaires bouffent des cabots trop mignons et où Facebook tout entier frétille d'une indignation aussi stupide qu'inutile. Vous aussi vous en avez marre? Après tout, les chiens c'est con comme la lune, ça se laisse crever sans chouiner et c'est même pas capable de se laver le cul soi-même. Si en plus, c'est délicieux, pourquoi s'en priver, hum? D'autant plus que les chiens, c'est un peu des vaisseaux de Satan, comme les films suivants le prouvent avec éclat. 

Pet ne parle pas vraiment de chien mais donne des infos intéressantes sur les gens qui les aiment. Ce mec trop chou qui travaille dans un chenil, vous vous dites: ami des animaux ET soignant? Par ici la bonne soupe! Pas si vite malheureuse! Derrière tout timide au grand cœur se cache un psychopathe potentiel (le degré de psychopathie étant souvent inversement proportionnel au degré de timidité comme on le sait par ailleurs) et qui dit psychopathe potentiel+cage+kétamine dit gare à ton cul ma fille. Notre héros tout mimi est donc Seth, jeune homme timide qui recroise par hasard une meuf  de son lycée qui l'a visiblement totalement zappé. Grâce à un stalking 2.0 en règle, il finit par essayer de lui sauter dessus dans un bar pourri avant de se faire corriger par son ex, barman raté avec deux neurones qui se battent au niveau des narines. Evidemment, Seth n'est pas content: comment apprivoiser cette petite sauvageonne qui veut simplement qu'on lui laisse faire sa vie sans l'emmerder ? Ping, fait la tête de Seth quand il la cogne par terre! Une porte dérobée, une cage en acier et le tour est joué! S'ensuite un film de captivité classique qui va cependant se corser lorsque des révélations seront faites…. Miam! C'est franchement pas mal, et il y a le drogué de Lost (j'ai la flemme de chercher son nom) qui est bien. Le twist est un peu gros pour moi mais bon, on peut pas tout demander. C'est déjà pas mal visuellement, même si ça manque de chien (haha)

En termes de chien méchant, il y a Cujo, sorte de Beethoven de Satan qui bave partout. Au départ, pourtant tout allait bien: Cujo était un bon pépère qui coursait le lapinou dans la brousse. Puis pouf, il se fait mordre par une chauve-souris, fille de Belzébuth par excellence et le voilou tout méchanou. Pauv' Cujo! Mais l'histoire principale, comme souvent chez Stephen King (oui, encore lui!) est ailleurs, puisque c'est celle de la famille Trenton: peur des monstres, infidélité, travail prenant – famille classique. Pendant ce temps-là, Cujo boulotte un, puis deux rednecks sans que ça n'inquiète personne.  La dernière partie du film est un joli tête à tête entre un Cujo de plus en plus jaunâtre et gluant du nez et une pauvre mère de famille coincée dans sa bagnole avec son petit Tad (qui a peur des monstres donc). C'est très chouette, assez angoissant et joli comme huis-clos en extérieur. Il y a des beaux travelling intérieurs, des tentatives de sauvetage ratées et des méchants coups de batte sur la tête à Cujo. Prends ça, clébard de mes deux!


Finalement, White God, un truc de fou malade complètement trop bien, avec une des séquences d'ouverture les plus belles du monde de la terre. Sans doute référence à White dog dont on a déjà parlé ici puisque ça parle de chien qu'on essaye de rendre méchants et qui finissent par se venger comme les bâtards qu'ils sont, na. Lili doit se tirer chez son père pendant trois mois et prend son clébard avec. Sauf que. Le padre en question n'est pas trop chaud et envoie chier Hagen, bâtard sensible. Ce pauvre Hagen va donc vivre sa vie de chien errant, qui est plutôt cool puisqu'il vit à Budapest, ville qui a du chien (re-lol). De rencontre en rencontre, on suit le cabot d'un côté et la petite de l'autre, qui fait sa vie comme elle peut –petits coups de cœur, mauvaise vodka, première nuit au poste, c'est émouvant. La dernière demi-heure est absolument géniale, tellement qu'on la raconte pas. Il y a de la meute en furie, de la galopade dans une ville qui a quand même un putain de style, des images là-dedans trop belles, une idée de fin du monde au-dessus de pas mal de trucs dans le genre. Wouf, mazakafa!

Pet, Torrens, 2016
Cujo, Teague, 1983
White god, Mundruczo, 2014

vendredi 12 mai 2017

Mommy, you're not watching me

C'est bientôt la fête des Mères: pensez  à Môman autrement qu'avec un nouvel aspirateur ou un bon de réduction pour se faire liposucer. Emmenez –la voir un film plutôt, histoire de lui rappeler à quel point vous êtes un bon gamin!

J'ai enfin vu un film de Dolan, depuis le temps qu'on me les brise avec ce type – et c'est pas mal. Mommy raconte une histoire de relation mère-fils un peu zonards de la life. Steve, ado un peu perturbé tendance schizo en déroute retourne vivre chez sa mère après s'être fait jeter d'un énième centre pour cinglés. Pas super happy, Diane se retrouve avec ce paquet encombrant; toujours à deux doigts de l'implosion et fan de Céline Dion en plus (décidément, les ados, c'est vraiment de la merde). Diane est aussi un peu à la ramasse, pas vraiment de taf, de projet, de vie en gros. Là-dessus se greffe une voisine taiseuse prof en burn-out qui a perdu l'usage de la parole. Hum. Départ pour une jolie tranche de vie à essayer de recoller des morceaux d'un semblant d'existence pour des personnages tous un peu largués, se démerdant comme ils peuvent avec leurs névroses et leurs casseroles, ressoudant ce qui peut l'être avec des vieux chalumeaux de récup. C'est très beau, parfois très bizarre, gênant, prenant, difficile à comprendre, exagéré, surjoué, pas crédible; c'est toujours quelque chose en tout cas, jamais chiant, jamais pédant et souvent pas loin de toucher à du sublime. Il y a ce cadre en forme de carré parfait qui fait bizarre et puis qui grandit parfois sans prévenir et  cette idée, si cliché et facile qu'elle puisse être, elle est aussi sublime visuellement et absolument géniale.  Enfin voilà, c'est chou. Et c'est  triste, parce que c'est ça qui est beau.

The eyes of my mother raconte aussi une histoire de fusion mère-fille qui se prolonge par-delà la tombe, brrr. La jeune Franscesca voit par hasard sa mère assassinée par un psychopathe qui passait par-là – comme souvent dans les coins paumés des States. Eduquée depuis la plus jeune enfance à disséquer des têtes de vaches mortes, Fransesca a même pas peur: elle aide gentiment son père à enterrer le corps  maternel et à enchaîner le cinglé dans la grange. Mais toute cette violence, ça a quand même fait bobo dans le cerveau à Frannie, même si elle ne montre rien. Le film se décline comme un roman d'apprentissage en trois parties, dans lequel on assiste à l'évolution et la maturation d'une petite fille dérangée en mode boîte noire. Aucune explication, pas de voix off ou intérieure, quelques plaintes parfois qui expliquent et le reste est silence, entrecoupée de fado portugais qui donne envie de chialer. C'est très beau, très léché dans l'image, impeccable pour l'actrice principale en madone ultra-gore rendue dingue par l'amour filial. Très joli noir et blanc,  pour une petite fable cruelle qui fait bien mal.

Enfin, The falling qui n'est pas tout à fait dans le thème mais où on trouve aussi une histoire de relation mère-fille pas loin du focus du récit.  Le film raconte une histoire d'hystérie collective dans un collège angliche om des petites jeunes filles se mettent à tomber dans les pommes à la chaîne comme ça, sans prévenir. Je viens de finir The devils of Loudun, relation étrange d'un exorcisme/hystérie de masse par le cher Huxley et suis donc friande de toutes ces névroses collectives: c'est bin chouette! Ici, on est plus dans une config' Picnic at Hanging Rock, autre film dans lequel des petites anglaises tombent  en pamoison sous la coupe du pouvoir phallique d'un gros rocher. Une ambiance un peu étrange, des visions fugaces au moment de l'évanouissement, des réactions en chaîne qui se font dans la lenteur d'un corps qui tremble et tombe, le tout dans un cadre automnal qui donne envie de mettre ses hunter et d'aller respirer l'odeur des sous-bois humides. Hum. Il y a quelque part dans le cadre cette mère un peu dépassée par les événements, un peu bouffée par une gamine en crise, mais qui sera finalement le point de résolution de l'histoire. Pas mal dans l'ensemble mais on aurait aimé un truc un peu  trash au niveau ambiance. C'est plus promenade folkeuse en tweed – genre Keane – quand ça avait le potentiel d'être dans l'esprit Crystal Castles. Mais bon.

Mommy, Dolan, 2014
The Eyes of my mother, Pesce, 2016
The falling, Morley, 2014

dimanche 7 mai 2017

Ecran total

Un peu dans le désordre pour un début de mois en vrac et dans l'incertitude générale: la démocratie sera-t-elle sauvée? Ce suspensme! J'ai vu un truc de vengeance qui me fait de l’œil depuis un moment, une dystopie agricole trouvée en passant et un truc plutôt fabuleux que j'ai failli laisser filer.

Je vois depuis un bon moment cette affiche dans le métro et comme elle est très bien faite, il n'y a aucune info pertinente dessus - réalisateur, acteur, nombre de cadavres. Comme je suis une fille débrouillarde et que je jouis de nombreuses heures de loisir au bureau, j'ai pris mon petit clavier et ai cherché: ce film est l'oeuvre de Arevalo, qui n'est autre que le flic badass de La isla minima. J'en vois des (un surtout) qui chouinent derrière son écran - haaa, ce film lent comme la mort, fait de plans sublimes quasi immobiles du delta du Guadalquivir, pas de dialogues, peu d'action, beaucoup de sous-entendus et de moues de cow-boy! Heureusement, Tarde para la ira n'a absolument mais alors absolument rien à voir - ni dans la forme, ni dans le fond. Sauf pour le côté cowboy badass, mais ça c'est trending en ce moment, suffit de voir la collection spring/summer de Zara qui a visiblement été dessinée par un cowboy daltonien schizophrène en pleine décompensation. Tout ça pour dire. L'histoire est simple: Jose traîne dans un bar et se fait poto avec une petite équipe - le barman, sa sœur Ana, sa femme Pili et tout le tintouin. Jose n'est pas qu'un type sympa: il essaye surtout de mettre Ana dans son lit, sans savoir que son mec sort de taule dans une semaine après  8 ans à l'ombre pour un braquage où ses potes l'ont laissé en plan. Pas cool. Alors après 8 ans, où en est la vengeance - et surtout, de qui viendra-t-elle? J'en dis pas plus, c'est pas bien. Construit par petits chapitres qui claquent, avec une image qui bouge beaucoup, très près des corps, nerveuse et sans beaucoup d'état d'âme, c'est carrément dans le western postmo plutôt que dans la contemplation. Une fin qui fait bien mal et qui fait pan. Ouille.

The White King raconte une histoire pas follement intéressante plantée dans une dystopie argicole pas des plus fofolles. Un petiot voit son père partir entre deux militaires un soir d'été sans en savoir plus. S'ensuit l'attente, les questions, l'ostracisation et la mise à l'écart. Il ne se passe pas grand chose, si ce n'est les trucs habituels d'une dictature: les flics sont partout, y sont méchants tout plein, les chefs ont des supers bagnoles et de pralines Léonidas, et la moindre petite blague mal placée t'envoie en zonzon. Rien de bien surprenant donc, sauf à un moment, une rencontre au pied d'une décharge qu'on croit qu'elle va mener le scénario ailleurs mais non. Au final une fin un peu meh dont on voit pas trop l'intérêt. Jolies images ceci dit, pas nul dans le visuel dystopique, musique un peu arty. Mouais.

J'ai failli pas regarder Get Out parce que je croyais que c'était une rom'com - ça commence un peu comme ça: un jeune garçon va passer le weekend chez ses beaux-parents et découvre qu'ils sont bien différents de ce qu'ils prétendent - avouez que ça pue la comédie choupinou avec Robert de Niro en père italien en chemise hawaienne. En fait, trop pas. Chris, jeune black de son état, passe le weekend chez les Armitage, des gens extrêmement blancs et un peu chelou à la longue. Ils organisent justement une soirée, tiens, avec pleins d'amis, dis donc! C'est dommage d'en dire plus, le film est hyper bien foutu avec une composante horreur certes mais une longue prépa qui prend la plus grosse partie du film et qui est elle beaucoup plus flippante, grinçante parce pas trop loin de ce qui se passe en sous-main dans les rapports blanc/noir aux States aujourd'hui. Une forme bizarre de mal-être, des relations de surface très normales mais qui craquent un peu au niveau des coutures. Après, ça part en délire pur et plutôt chouette sur un thème que j'adore mais que je ne dévoilerai pas, pour se finir dans un bon bain de sang comme on les aime.


Tarde para la ira, Arevalo, 2016
The white king, Helfrecht & Tittel, 2016
Get out, Peele, 2016

vendredi 5 mai 2017

Franz is da shit

Grand-Verly, 2014

29 mars
Le plaisir que me procure la salle de bains. - Connaissance progressive. Les après-midi passés en compagnie de mes cheveux. 

Kafka, Journal 

lundi 1 mai 2017

Total freak

C'est parti d'une proposition indécente - le film Pieles - pour devenir un freak fest cette semaine - et pour une fois, pas tout à fait de ma faute, faut arrêter de me suggérer des trucs tordus, merde.

Dans le genre gluant, j'ai vu Hellraiser dont je pensais que c'était un jeu vidéo (??) mais en fait non. Steve et Julia ont bien de la chance: ils viennent de récupérer une super baraque en héritage, la chance! Comme souvent, la maison n'est pas en top état et la déco, pas trop ça. Entre les rats qui gazouillent et les asticots qui grouillent, c'est ambiance. D'autant plus que Frank, frère de Steve (et amant de Julia, c'est du joli) a laissé de ci-delà des trucs à lui dans la baraque avant de disparaître mystérieusement. Il a aussi laissé une partie de son ADN dans le sol, tiens, et va être ramené à la vie grâce au sang de Steve qui ne se doute mais alors là, de rien. A partir de là, le Frank est un truc plutôt gluant qui se met à retenter le coup avec Julia tout en lui expliquant un truc abracadabrant sur des Cenobites, un univers parallèle et des pratiques SM assez gore/ Mouais. En gros, il a accès à un autre univers dans lequel plaisir et douleur ne forment plus qu'un, mais qui est gardé par des types patibulaires avec des têtes chelous, dont mon préféré est sans aucun doute l'adipeux-cool:
Beau Goooosse!
Parce qu'on sait que toutes femmes sont des suckeuses pour n'importe quel type un peu ténébreux qui a mal à sa vie (et à son vit), Julia se laisse tenter par le diable et c'est le début de la fin. C'est pas mal fait, surtout les monstres, vraiment bien dégueu; par contre le truc de la boîte qui fait entrer dans un univers alternatif c'est un peu bof, on capte pas trop le truc SM - enfin c'est un peu torché n'importe comment.

Un poil au-dessus dans le bizarre, il y a The Greasy Strangler qui comme son nom l'indique, parle d'un étrangleur mystérieux recouvert de graisse bien gluante. Miam. Ronnie et son fils Brayden, un peu looser sur les bords, organisent des circuits touristiques consacrés à l'histoire de la disco, pipotant de ci delà des touristes en déroute. A part ça, ils mangent des saucisses grasses, du bacon graisseux et ajoutent un peu d'huile dans leur café le matin. La nuit, parfois, Ronnie se relève, se roule dans le gras, assassine un quidam puis passe au carwash se refaire une beauté. La routine quoi. Comme très souvent, arrive une femme dans cette dynamique bien huilée - et c'est le bordel. Janet, rencontrée au détour d'un tour, avenante et sympathique, commence par jeter son dévolu sur le fils pour se demander si le père n'est pas mieux membré (véridique Rivers). Pour l'intrigue, c'est à peu près tout: il ne se passe pas grand chose mais il s'en passe des belles. C'est difficile à décrire comme film, mais ça fait très très fort penser à du John Waters période Divine: des dialogues ultra plats déclamés dans un style de mauvais sitcom, des situations tendance scato, des personnages ultra-freak, pas mal de trucs sexuels un peu chelous et une petite musique qui fait ouin-ouin ( comme parfois dans Pecker). Au final, ça donne un truc plutôt drôle si on aime le wtf et les yeux qui font plop!

plop
Point de départ de ces tribulations, Pieles, truc de freak complet avec des fétiches sexuels bizarres, des détails anatomiques difformes, des sentiments gluants et quand même, au final, de l'amour - parce que c'est la vie! On suit en fait les tranches de vie de quelques personnages tordus, du dedans ou du dehors, qui se croisent, se touchent, se parlent parfois. Entre la fille qui a un anus à la place la bouche (et vice versa), la pute sans yeux, la fille au visage qui dégouline et le type qui rêve d'être une sirène, y sont mal barrés. Heureusement, le monde est bien fait et de freak à freak, on finit pas trouver un équilibre dans la névrose entre corps imparfaits et esprit vicieux. C'est un truc assez radical à plein de niveaux: ça va relativement loin dans le côté weird tout en se déclinant dans un univers complètement pastel, mauve et rose, avec des pulls assortis aux rideaux. Comme dans les deux films précédents, on se rend compte que les films de freak sont très souvent organisés autour du rapport au sexe et au désir (du  paragonique Freak à la saison 5 AHS qui s'amusait pas mal avec ça): pourquoi et comment on aime, on baise, on désire quand on est dans cette zone à la limite de la normalité tout en étant (quand même) humain? Que la sexualité soit un référent pour mesurer le degré de normalité et le centre autour duquel se cristallisent les questions de difformités, c'est pas nouveau et Foucault en parle sur des pages assez magnifiques ici - parce qu'on y revient toujours, à Michel.

Hellraiser, Barker, 1987
The greasy strangler, Hosking, 2016
Pieles, Casanova, 2017