vendredi 23 décembre 2016

Ecran total

Y’a plein de trucs intéressants qui me passent entre les mains pour le moment mais très peu de temps pour en parler. Je me suis par exemple souvenue que je n’avais quasi rien vu d’Assayas, que j’aime pourtant beaucoup. Alors quoi ? Alors j’ai regardé. Quel bonheur !

D’abord, Sils Maria : histoire d’une actrice vieillissante qui se confronte à la jeunesse, à la mort et à ses rides dans la rencontre avec son rôle, la montagne, les nuages , tout ça. Bon dit comme ça c’est un peu bordélique mais voilà : Juliette Binoche est une actrice bien mure qui se voit proposer de reprendre le rôle de la vieille dans une pièce qu’elle a jouée il y a 20 ans ( et où elle tenait le rôle de la jeune (oui, c’est une histoire d’amour et de coucher pour réussir)). Perdue dans un cabance dans la montagne, hantée par le fantôme de l’écrivain, mort juste en début de film, elle répète ses lignes avec sa jeune assistante, la Kirsten Stewart qui depuis qu’elle a mis des grosses lunettes peut faire du cinéma d’auteur en rentrant les épaules – c’est chic. Les paysages idyliques, les crises de nerfs hystérique, la conscience du temps cyclique : tout ça est très hic. D’ailleurs, elles éclusent pas mal, les petiotes. C’est assez brillant dans l’incertitude entre rôle et vie réelle, dialogue joués et naturels - d’autant plus que tout est joué, même le joué-joué. Assayas nous montre donc sa grrrrosse mise en abyme et c’est même pas mal. Peut-être un peu de caricature dans le rôle de la jeune actrice aux dents longues un peu fuck the system : comme si un truc pareil pouvait encore exister aujourd’hui.

L’autre Assayas, c’est Demonlover, pitch intéressant – une entreprise rachète un studio de manga porno pour devenir le premier distributeur de porno en Europe (ou un truc du style) mais quelque chose de louche se trame, héhé. Au final, pourtant, c’est un peu flou : on se comprend pas bien qui trahit qui, et surtout pourquoi. En tout cas, la vengeance a l’air de faire méga mal.  Il y a tout un truc sur le sexe, le pouvoir, les gens super froids (qui ont toujours besoin d’une écharpe en open-space, pff) et le feu sous la glace de ces frigos ambulants (dans le fond, ils sont chauds comme des baraques à escargots). C’est aussi rigolo du point de vue thriller technologique : ça date un peu quand même, avec des sites web du darkweb qu’on peut y arriver avec un mdp style 123456, des ordis sous Windows 98’et des anims 3D toutes pourries. Bref.

Toujours dans la déviance sexuelle et la vengeance divine, c’est El Club, sympathique drame chilien sur des petits curés perdus au bord de la mer qui font pénitence pour leurs désirs bizarres. Une bande de tarés que l’abstinence a rendus fous paumés au milieu de nulle part, genre dans un endroit bien rural plein de gens super tolérants, en voilà une bonne idée. En fait, il ne sa passe pas grand-chose : ils se promènent sur la plage, entraînent  un lévrier et font leur prière. Arrive un nouveau curé, entraînant dans son sillage un jeune bourré qui a des œufs à peler avec l’église (enfin, qui s’est déjà fait peler les œufs en fait, mais on va rester polis) et qui se met à brailler, comme tout bon bourré, sous les fenêtres des curés à qui ça ne plaît pas trop. Pim, paf pouf, et voilà un cureton la cervelle éclaté sur le carrelage. Pas prop’. A partir de l’introduction de cet élément étranger et disruptif, les choses vont se mettre à partir un peu en couille (haha). Confessions à tous les étages, repentances et pénitence en folaïe, on en prend pour son grade religieux. Visuellement, c’est très beau, dominé par des couleurs clairs nimbées d’une lumière blanche de fin du monde puis évoluant petit à petit vers le noir, la nuit, les contrastes de l’ombre. Très contemplatif, silencieux. Ce qui fatigue un peu, ça et la musique avec violons dans tous les sens, cloches d’église en mode glas-de-la-mort et cette impression de climax qui n’en finit pas – genre 30 minute de climax, c’est trop.

Sils Maria, Assayas, 2014
Demolover, Assayas, 2002
El Club, Larrain, 2015

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