dimanche 28 septembre 2014
mardi 16 septembre 2014
Ecran total
Toujours en vrac et dans le désordre:
J'avais adoré Une ordure, que j'ai lu en français. L'adaptation rend justice à l'ambiance crado-écossaise de Welsh et au caractère de gros pourri de Bruce, une bonne ordure de flic aux dents longues et au nez tout poudré. Filmé comme une bonne blague mi-hallucinatoire, mi-clip de Blur, il manque quand même quelques éléments du bouquin qui étaient justement ceux que j'espérais secrètement voir à l'écran: le vers solitaire géant qui habite l'intestin de Bruce n'aurait-il pas pu être une grosse masse informe, entre le pudding radioactif et le phallus cronenbergien? Au lieu de ça, on des séquences bof avec un médecin fou et un vers sur du papier. Autre tic: les masques d'animaux. Genre, c'est en train de devenir un truc. Par contre, et même si j'ai relativement honte, j'ai eu un moment d'émoi quasi sexuel en réentendant ça. La dure vie des coursier DHL polonais.
Plus classieux niveau BO (Screamin Jay Hawkins!) mais moins fun dans l'ensemble est Stranger than paradise. Alors on a compris que c'est une sorte de non-film - y se passe rien, les gens vont et viennent sans jamais aller nulle part, à base de malentendus et de quiproquos qui ne finissent pas toujours bien - un aller simple pour Budapest par exemple, pour notre pauvre héros qu'a même pas pris sa petite laine. Un humour genre du coin des lèvres, une nonchalance bien 80's et des beaux chapeaux.
Boyhood est un concept plutôt qu'un film: l'idée de filmer sur une dizaine d'années les mêmes acteurs relève d'un certain tour de force et d'une conception du temps qui manque un peu aujourd'hui. C'est vraiment bien foutu et pas du tout longuet, vachement bien écrit et joliment joué. L'évolution est surprenante et le manque de scansions temporelles claires ( type " un an après", " six mois plus tard") rend les choses encore plus intéressante puisqu'on ne peut qu'évaluer à vue de nez combien de temps s'est écoulé entre deux séquences. Par contre, c'est plutôt moche du point de vue image - ça ressemble un peu à un film de famille, mais du coup, ça pourrait tout aussi bien fonctionner dans le genre anti-esthétique. La question à deux balles: Ethan Hawk a l'air d'être lié par un contrat bizarre à Linklater - genre pour les 15 prochaines années, ta vie m'appartient, hahaha. Alors, contrat juteux, obsession bizarre ou IOU sataniste? Mystère.
The Secret s'appelle en fait The Tall Man - pour qu'on soit sur de rien piger. Jessica Biel ne ressemble pas beaucoup à elle-même, sauf avec du sang barbouillé partout et les pantoufles dans la gadoue. Le scénario est intéressant, avec parfois un peu beaucoup de rebondissements complexes et fouillés à la fois - je fus confuse. L'ambiance générale entre Russel Banks et The Killing est impeccable, avec des types à casquettes et des pick-ups plein de chiens méchants. Northern comfort? Pour ce qui est du twist final - le business model présenté gagnerait à être examiné par le prochain gouvernement: quid d'une vaste action "Toi aussi, adopte un chômeur wallon!" à l'intention des familles flamandes tendance CDH en mal d'humanitaire?
Filth, Baird, 2013
Stranger than paradise, Jarmusch, 1985
Boyhood, Linklater,2014
The Tall Man, Laugier, 2012
mercredi 10 septembre 2014
Fin(s) de mondes
J’ai récemment entamé un cycle tiré des
dernière journées cinématographiques dionysiennes (ha que j’aime cette
appellation) autour du thème Fins de
Mondes. Comme je ne regarde pas les films dans l’ordre, il y aura
probablement un sens final qui m’échappera toujours, mais c’est inconsciemment
le but. Ceux que j’ai déjà regardés m’ont cependant bien réjouie.
Dreams raconte 8 rêves de Kurosawa – on ne
peut plus simple comme concept. Dans l’ensemble, ça tourne autour de l’idée
d’une race humaine qui court à sa propre perte, d’une civilisation qui va finir
paumée sur un volcan, perdue dans la montagne, abandonnée sur un rivage
radioactif, mais quelques visions résistent et distillent une sorte de couleur
plus douce. Une procession de mariage de renards entre aperçue dans la forêt
par un petit garçon, un peintre errant dans les toiles de Van Gogh et une
procession de funérailles avec des gens qui sautent bizarrement. Je ne suis pas
trop convaincue par le visuel onirique de tout ceci qui reste très narratif et
perd parfois la force de simultanéité des rêves dans leur état pré-narratif,
enchevêtré. Mais ça ressemble plus à des contes en forme d’adieu, de testament
peut-être.
Body snatchers demande à ce que je voie toutes les
autres versions histoire de pouvoir faire un comparatif, mais j’ai vu celui de
Ferrara et il me semble aussi bon qu’un autre. J’aime l’idée que les gens
soient peu à peu remplacés par des
robots sans sentiments : dommage qu’on ne pose jamais la question de
pourquoi c’est si dramatique. Ici, c’est encore plus beau, parce qu’on ne voit
pas trop où ça va : qui veut prendre quoi en otage et pourquoi ? Il y
a un côté gratuit plutôt drôle. L’idée qu’on puisse repérer les gentils à ce
qu’ils sont tellement préoccupés par les autres qu’ils se font direct choper me
fait bien rire : zont qu’a apprendre à encaisser un peu. When the goings get tough, the tough
get going après tout.
The King of New-York est lui aussi vraiment réussi – dans la veine
des types tout seuls maudits qui finissent en bouillie sur le trottoir. Autant
Dafoe dans Go Go tales est super
touchant, autant Keitel est atroce dans Bad
Lieutenant, autant Glover est indéfinissable ici : il est smooth, mais
alors délié et souple comme un crooner aux poumons de velours. J’ai évidemment
tout de suite eu la nostalgie de ceci mais j’ai aussi été surprise par tout le
contexte musicale de l’émergence du hip-hop et du travail sur l’ambiance coupes
afro carrées, épaulettes démesurée et du Schooly D en fond
sonore.
Et finalement, The Addiction, toujours du même, une jolie histoire en N/B sur la dépendance
mais aussi sur NY de ces années-là, des bas-fonds d’une ville qui semble avoir
un peu disparu d’ailleurs, avec des back alley pleines de types en imper qui
mordent le cou des jeunes thésardes en quête de nietzschéisme sanguinolent.
L’idée que les vampires écrivent de meilleures thèses que les autres ne m’est
pas inconnue et c’est une piste qu’il faudrait penser à considérer avant toute autre. Beaucoup de
gens qui chuchotent ici encore – plus les héros sont puissants, plus ils
parlent bas. Ceux qui chouinent le font haut et fort par contre. Intéressant
quoique cryptique.
Yume, Kurosawa, 1990.
Body Snatchers, Ferrara ,
1993.
The King of New-York, Ferrara , 1990
The Addiction, Ferrara ,
1995
mardi 9 septembre 2014
Ecran total
Sans vraiment de tentative de trouver un
principe unifiant aux quelques films intéressant vus récemment et dans le
désordre :
Freaks, bleuette intéressante de Browning, qui n’est pas loin d’une comédie de
remariage telle que la qualifie Cavell, mais dont l’intérêt est évidemment
ailleurs que dans la narration. Une longue exergue en amont du film tente de
justifier le choix du réalisateur de montrer l’univers de freaks de cirque (« y
sont comme nous mais tout le monde l’est méchant avec eux ») mais plus
elle dure, plus elle finit par créer un effet inverse : on s’attend alors
à voir un truc franchement dégueulasse, des types avec des bras à la place des
pieds et le tout dans une lumière digne et documentaliste. Hum. C’est sans
compter que c’est produit par la
Metro et que ça reste donc un bon film des familles. Les
freaks sont bien sur pas bien jolis (on s’est posé la question de la viabilité
de certains amputés, tellement rabotés qu’on se demande bien comment ça marche)
mais restent dans l’ensemble plutôt sympas, souvent joviaux, et relativement
débrouillards. La mise en scène d’une tromperie amoureuse sur le thème de la
bonne qui se chope un nain pour récupérer son fric (genre inédit) ne fait pas
oublier les longues séquences fascinées dénuées de tout projet artistique autre
que de montrer comment un type sans bras ni jambes arrive à s’allumer une
clope. On est bien évidemment impressionnés, mais alors pourquoi ce besoin
d’invoquer l’injustice humaine faite aux bêtes de cirques quand elles sont
finalement l’objet a du film ? On
parle aussi de ce film comme pré-lynchéen. Enfin, à cette allure là, Bosch
l’est aussi, alors bon, hein.
The East raconte une histoire inconnue –
est-elle bien crédible ?- celle d’une agent secrète privée qui traque des
terroristes écologistes pour le compte de grandes sociétés américaines qui
foutent du pétrole dans nos pâtes intégrales. Après moults squattages dans des
maisons en cartons, des bains collectifs dans la rivière et des longue soirées
tricotage de pull en poils de barbe rousse, elle finit bien sur par (spoiler
alert) aimer ses ravisseurs (surtout le grand et poilu Skarsgard, qui
décidément sait tout faire, y compris sauter ses nouvelles recrues dans les
bois (sans les mains ! ouh !)). Bon, c’est un sujet inédit, plutôt
pas mal branlé : pas vraiment d’envergure dans le questionnement moral
sous-jacent, des images pas mal dans le genre univers industriel
postapocalyptique VS la nature et les petits oiseaux et un rythme pas mal mené.
Je confonds Crash
de Cronenberg avec au moins un million d’autres films, du coup j’ai encore du
mal à croire que le film que j’ai vu est bien celui qui est le bon. Il y a bien
des trucs familiers – le rapport organique/machine, les cicatrices équivoques,
les morceaux de ferraille dans tous les sens et des acteurs qu’on dirait qu’on
les connaît mais sans jamais savoir si c’est eux (ou leur jumeau canadien
maléfique). Pour le reste, c’est plutôt étonnant : les clés du film sont
données assez vite (le sexe/la mort/les bagnoles, le tout pris dans une
certaine forme d’esthétisation fascinante créée par la société du spectacle)
mais les scènes de cul durent étonnamment longtemps – genre constituent
probablement 75% du film. A posteriori, ça fait plutôt sens, puisque
l’accumulation et l’insistance vont vers une montée graduelle de la violence,
mais ça peut interloquer au départ. Ça reste plutôt sexy cela dit –
contrairement au reste de la filmo qui fait parfois un peu dégueu.
Freaks, Browning, 1932
The East, Batmanglij, 2013
Crash, Cronenberg, 1996.
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