lundi 15 octobre 2012

Ecran total

John Carpenter est-il un poète de la mort ordinaire? Après avoir vu Assault on preccint 13 et The village of the damned, on peut se poser la question. On voit dans ces deux films des gens se faire tuer dans une sorte d'a-climax et avec une nonchalance qui laisse perplexe. Les enfants super creepy qui ont envahi le village des damnés éliminent les héros les uns après les autres comme on règle un problème de cafards et les vilains gangs de Assault assassinent de façon furtive, quasi fantomatique. L'impression d'ensemble est étrange: pas d'hystérie, pas de sang à gros bouillons et de boyaux qui pendouillent.

Pas d'hystérie non plus dans La taupe, qui fait de l'espionnage sans en avoir l'air - du contre-espionnage donc. Pas mal mis en scène, jolies images et voitures anglaises vintage. C'est bien quoi. Gary Oldman fait un peu peur quand même. 

Au contraire, Lemmy Caution est un agent fédéral que le cliché ne dérange pas. Puisqu'il faut en avoir vu au moins un, ne fût-ce que pour entendre un des personnage dire " Prends garde, Caution", prononcé "Kochaune". Y a un effet comique qui vient de la diction super zarbi de Eddy Constantine  et des blagues bien lourdes. Les problèmes dermatologiques d'Eddy et ses mouvements de kung-fu trop staïlés nous font penser à un Van Damme alpha. Vous pigez?

En général plutôt obsédée par les sourcils, j'ai été gravement perturbée par le menton de Mitchum, qui ressemble à un mini-fessier: Out of the past parle d'un type qui veut fuir son passé pour refaire sa vie avec une greluche puis rattrapé par son passé, décide de fuir cette greluche pour refaire sa vie avec son passé- enfin, pour repartir de zéro et monter une petite entreprise qui ne connaît pas la crise et refaire sa vie avec une greluche plus fraîche  donc. Mais le passé le rattrape - bigre - et tout fout l'camp. Heureusement, la rédemption arrive toujours et comme dans Angels with dirty faces,  seule la mort apporte une vraie rédemption. Putains de bigots.

Sur des questions de vie, de mort et de qui est quoi et où va-t-on, voir aussi Le monde sur un fil, qui est un putain de morceau. On retrouve les habituels de Fassbinder - Ali, Martha , l'épicier d'Emmi et la barmaid à menton mou, dans une histoire classique de science-fi: un ordinateur crée une simulation de monde réel, entraînant à terme une interrogation sur la réalité du monde dans lequel cette simulation a été mise en place - qui pourrait n'être qu'une simulation etc. Les surfaces en métal, verre, miroir; blanches et grises des scientifiques s'opposent aux couleurs putassières, aux fourrures, aux débordements de chair des femmes à moitié hystériques qui répondent au téléphone; les stridulations et les gros plans subits sur le héros en proie à de la torture par ultra-son et les synthés 70's donnent un petit côté Scanner et on voit toujours beaucoup de portes et de chambranles. Quant aux questions ontologiques, on préférera cette traduction méga libre de  Dušan Radović :

"Le Palais de Belgrade est pointé comme un index vers le ciel.
Par son apparence et sa position, il donne des réponses aux éternelles et fatales questions de l'homme.
Qui est coupable? Par où est la sortie? A qui se plaindre?" ( Beograde, dobro jutro, 26 novembre 1975)

Assault on preccint 13, Carpenter, 1976
The village of the damned, 1995
Tinker tailor soldier spy, Alfredson, 2011
Les femmes s'en balancent, Borderie, 1954
Out of te past, Tourneur, 1947
Welt am draht, Fassbinder, 1973

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