vendredi 6 mars 2015

Ecran Total

Les films d'horreur "à enfants maléfiques" sont souvent monotones: on retombe quasi inévitablement dans des trucs de possessions, d'amis imaginaires, de pauvres gamins visionnaires malgré eux et on peut regretter de ne voir pas plus d'histoires qui révèlent la face cachés des chiards: ce sont des monstres et pas seulement en puissance, mais des affreux accomplis. The Children va peut-être dans cette direction, même s'il se cantonne à de la série B: les marmousets sont ici carrément sadiques, et les parents, comme souvent dans cette configuration, complètement avachis du cortex quand il s'agit de leur chère progéniture. Une soirée de Nouvel An, la campagne british, une famille bien au chaud dans un chalet sous la neige et une tripotée de marmots qui convaincrait le plus fervent pro-life de changer de bord: pas besoin d'en dire plus. Les gniards vont petit à petit prendre le pouvoir, face à des adultes rendus totalement crétins par l'amour qu'ils leur portent - depuis la fiancée de Frankenstein, on sait pourtant que c'est l'amour, toujours, qui précède le découpage en petits morceaux. Dans un beau décor tout blanc qui fait très joli avec les éclaboussures de sang, on assiste à un massacre en règle -s'ils n'étaient pas en train de se faire étriper, je suis certaine que ces parents féliciteraient leur descendance pour sa créativité. Pas forcément de suspense dans le déroulement, mais quelques bonnes surprises. Ce qui fait peur, ce sont les 20 premières minutes et l'angoisse de tout spectateur: quand c'est qu'on tue quelqu'un? Va-t-on vraiment passer une heure et demie avec  cette bande de braillards? Heureusement, les enfants se taisent parfois - surtout quand ils égorgent, c'est bien connu.

Encore un film à la gloire de l'amour et des fleurs dans les yeux! Honeymoon raconte la charmante histoire d'un couple méga-bobo, plein de fantaisie et de whims, qui cherche à prouver au monde entier qu'on peut être amoureux sans être mièvre et se marier sans être des vieux cons... Une cabine dans les bois plus tard et ces petits crétins ont oublié leurs élans fougueux et rangé leur yourte: ça va chier. Madame se perd dans les bois et rien ne va plus: elle perd ses affaires, ne sait plus faire de crêpes, avoue des trucs horribles ("Quand j'étais petite, je voyais des chiens, partout tuais des grenouilles pour en faire des appâts, mouahahahaha") et ne rigole même plus aux blagues de Monsieur. On pourrait croire qu'elle réalise enfin qu'elle a fait l'erreur de sa vie et qu'elle aurait dû, elle aussi, relire son Nietzsche* avant de sauter dans une robe blanche toute pourrie. Mais non! Le mariage rend heureux, c'est évident! C'est encore un coup des francs-maçons! Ou des trucs chelous qui peuplent la forêt. Bon, le reste du film part sur une idée type body snatchers. On aurait aimé avoir plus de détails sur la transformation finale - mais, hé, film indépendant ici: on aura qu'une vague image d'une femme à moitié plante et qui correspond peut-être mieux à ce qu'est le mariage, au fond.

Il n'y a pas grand chose à  comprendre à Réalité: le héros principal est un sanglier qui mange une cassette. De cette matrice, récupérée par Réalité dans une poubelle, naît un film complètement dingue qui  repasse par les mêmes coordonnées du réel sans jamais se boucler sur lui-même. Entre un producteur obsessionnel, un réalisateur hongrois (?) taciturne, un directeur d'école qui planque un twin-set rose sous le siège de sa jeep militaire, se ballade un wannabe Cronenberg avec une idée à la con- des télés qui tuent des gens- et une mission : trouver le gémissement le plus réussi de l'histoire du cinéma. Du point de vue de l'image, c'est très doux, dans des tons neutres gris/brun/beige, une tonalité fauve qui fonctionne avec les animaux qu'on retrouve un peu partout - des peaux de bêtes, des marmottes empaillées, des tapis à poils longs et des boiseries quasi organiques. Le génie consiste à passer d'un niveau à l'autre - ce sont tous les mêmes au fond - sans rejoindre jamais le début (lequel?). C'est beau comme une figure topologique lacanienne et on pourrait dire sans trop se planter que pour le coup, la réalité a bel et bien structure de fiction. You did it again, Dr. Lacan!

The Children, Shankland, 2009
Honeymoon, Janiak, 2014
Réalité, Dupieux, 2014

*Beaucoup de brèves folies, - c'est là ce que vous appelez l'amour. Et votre mariage met fin à beaucoup de brèves folies, par une longue sottise !

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