jeudi 23 mai 2013

Ecran total

Crni Bombarder est un film qu'on m'avait présenté comme culte au même titre que Kako je propao rokenrol. Les deux films n'ont cependant pas grand chose à voir, si ce n'est la présentation d'un certain milieu underground belgradois des années 80-90. L'histoire d'un DJ fou, qui appelle à la révolte dans un futur lointain a de quoi faire sauter en l'air quand on voit la date de sortie du film - on se dit, bigre, mais que voilà une véritable ode aux libertés du peuple. Las, la fin réussit en 5 minutes à foutre tout ça en l'air et fait d'un film couillu une ode aux dictateurs, qu'ils sont meugnons lorsqu'ils ont un nom en -ic. Il est cependant plus que probable qu'il y ait un sous-texte à cette fin qui m'a échappé - gap culturel et tout ça. Reste une certaine inventivité dans la recréation d'un décor urbain à la Blade Runner, une séquence tout à fait hallucinante vantant les mérites de la vie au grand air et des pulls jacquard, et une réplique culte, celle du Dirty Harry local: à l'affirmation du Crni Bombarder qu'il est "un esprit qui marche/va", il a cet trait à-la-Justified " Ma ti si kurac na biciklu" qu'on peut traduire par " T'es juste une tête de nœud à bicyclette". Stay frosty.

Sightseers est un film de Ben Wheatley, qui m'avait déjà bien traumatisée avec Kill list. Celui-ci est nettement plus drôle et nous fait découvrir les merveilles insoupçonnées de l'Angleterre profonde, tels le musée du crayon et nous apprend à reconnaître différents types de caravanes - toujours utile. Un type super chelou emmène sa meuf en vacances et se met à tuer des gens. Comme dans toute bonne histoire, il s'avère qu'elle est elle aussi complètement jetée, et tout ça fini comme il se doit: mal, mais avec une petite touche d'humour anglais très bienvenue.

Ça fait un moment que Krugovi ( " Cercles") est sorti ici, et que tout le monde en parle et en chante les louanges et bave dessus. L'idée ne me plaisait pas à la base (= parler de la guerre de Bosnie à partir d'un fait divers réel). Les films sur la guerre sont assez difficiles à appréhender vus d'ici, pour une raison qui se passe de commentaires, et partir d'un fait divers me semble toujours vouloir réduire les choses, les prendre par le bout le plus facile, c'est-à-dire celui de l'humain, du niveau zéro de la mise à distance. Or le film est très bien fait, et s'il se base sur une histoire vraie, utilise une approche très concentrique par rapport à celle-ci: elle est surtout un noyau autour duquel les 3 récits qui se déploient dans le film s'organisent - en cercles, donc. Trois lieux et trois personnages liés par un événement qui n'est raconté qu'à la fin, et sans pathos. Les choix formels contribuent à cette mise à distance: peu ou pas de musique,  des plans très " Seidlien" ( je manque un peu d'outils conceptuels pour les caractériser plus précisément), fixes, dans lesquels les personnages sont rarement au centre, et très peu de gros plans, avec des ambiances souvent froides ( plans de barres d'immeubles, de couloirs d'hôpital vides, d'usine) ou bien désertes; une approche assez béhavioriste finalement, qui ne cherche pas à expliquer les choses. Il y aurait bien quelques trucs qui m'ont parfois semblé faciles ( rédemption pour tout le monde à la fin), mais c'est bien aussi parfois de faire en sorte que les choses s’apaisent - au moins au cinéma.


Crni Bombarder, Bajic, 1992
Sightseers, Wheatley, 2012
Krugovi, Golubovic, 2013


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