jeudi 30 janvier 2014

Ecran total

J'ai tellement adoré la prestation Caseyaffleckienne de Welles dans The lady of Shanghaï que je me suis jetée sur Macbeth comme la faim sur le monde. Le théâtre au cinéma, c'est pas évident, mais là c'est quand même autre chose. Il paraît qu'il y a eu des changements dans le texte original, à un certain stade on s'en fout un peu, vu l'incertitude dudit texte, et si ça marche comme ça, bah. Le palais en rochers de western et en grottes bizarres crée un côté spéléologie en carton super inquiétant. Les sorcières, qui sont un peu mon personnage préféré sont bien sardoniques et l'idée d'une petite poupette vaudoue est plutôt bien trouvée. J'ai également enfin capté l'utilisation de la profondeur de champs de Welles, avec des gens à tous les plans. Yay me!

Je suis nettement moins convaincue par Le septième seau, devant lequel je me suis ennuyée comme un rat mort (de la peste, dans d'atroces souffrances). C'est probablement ma punition pour avoir voulu faire la maligne en matant des films de grands. Pourtant, l'apocalypse est de loin mon livre favori et je suis encline à aimer une bonne histoire de bubon. L'image est superbe, j'ai compris tous les mots ( j'ai bien compris merci) et j'ai capté la foultitude de symboles disséminés ça et là (masque de mort, scène de théâtre, bambin riant) mais c'est quand même un peu lent à mon goût. J'ai bien aimé le côté Monty Pythons des processionnaires qui se tapent la tête contre des planches.

The wolf of Wall street est le premier Scorsese que je voit au cinéma, pour du vrai. J'en suis sortie un peu sonnée (looooong! faaaaaaim) et hésitante quant à quoi en penser. Mon premier réflexe a été d'associer le couple Taxi Driver/Raging Bull et The Aviator/The Wolf comme deux visions parallèles du rêve américain: même acteur, même paranoïa, même obsession de la virilité, du pouvoir avec des parcours un peu différents ( minable VS mogul) mais toujours le même crash final. J'ai eu par contre un peu de mal à comprendre si Scorsese trouvait ça pathétique, drôle, bouffonesque ou carrément bandant: la personnalité assez atroce de Belfort a quand  même l'air de bien faire kiffer papi Martin. J'irai pas jusqu'à dire qu'il y a une certaine forme de jouissance nitezschéenne, ce serait donner un crédit intellectuel au film qui, même s'il m'a plu dans l'ensemble, est lisible à un premier niveau comme une apologie d'un comportement ultra misogyne, pas loin du racisme de classe et surtout, surtout, une ode à la bêtise qui trouve son absolution dans le pognon. 

Mais. J'ai ensuite entendu une émission, qu'elle est méchante, qui m'a donné une autre piste, c'est celle de relire The Wolf en parallèle avec les films maffieux de Scorsese. Je n'en n'ai pas vraiment vu ( ou alors il y a longtemps), du coup, j'ai maté The Goodfellas. Une impression de déjà vu super bizarre, qui me fait dire que j'ai peut-être en fait déjà vu ce film, va savoir, l'autre explication est qu'une grande partie des scènes sont devenues cultes ( ma mesure personnelle du statut-culte étant leur introduction dans des épisodes des Simpsons), du coup, bah je les avais vues. Bref. La comparaison est plus intéressante, parce qu'il y a pas mal d'éléments communs entre les deux films, que ce soit filmiques (les longs travelling qui suivent le personnage dans des dédales, les alternances nerveuses de champ/contre-champ dans les discussions qui règlent le statut de pouvoir des personnages), narratifs (la journée où tout s'emballe rythmée à la limite du slapstick, la chute finale qui tient à des détails à la con), thématiques ( le pouvoir, le fric, l'opposition entre gens honnêtes et maffieux, la perte de contrôle, la marge parfois fine entre non-respect de la loi, qui fait mouiller et l'absence de toute humanité qui confine à une certaine forme de monstruosité fellinienne). L'idée serait que dans les films maffieux, on sent une sorte de respect de Scorsese pour ses personnages, alors que Belfort est représenté de façon délibérément bouffonesque. Je me tâte encore là dessus, parce que si c'est certain qu'il y a un côté plus pantalonnade dans The Wolf, je trouve Henry Hill plutôt pathétique à certains points de vue. 
Comme le dirait un illustre acolyte anonyme: E pericoloso Scorsese si.

Macbeth, Welles, 1948
Det sjunde ingeslet, Bergman, 1957
The wolf of Wall street, Scorsese, 2013
The Goodfellas, Scorses, 1990

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