vendredi 15 janvier 2016

Neo-noir is the new black

Mine de rien, comme ça, en passant, je me suis mise au néo-noir, après avoir enquillé du noir pendant un moment. J'en avais conclu rapidement, qu'il s'agissait en fait de noir, mais en couleurs et plus noir que noir - disons carrément désespéré, là où le noir garde quand même une sorte d'échappatoire moral au niveau de la conclusion. Bon, quand c'est néo, c'est forcément contemporain et donc généralement plus nihiliste au niveau de la rédemption possible. Les trois films que j'ai vus cette semaine sont pile-poil dans cette veine, tournant tous autour de l'idée d'impuissance de la loi, d'injustice absolue et de comment les gentils se font toujours entuber au final.

New-Jack City raconte la montée d'un petit caïd devenu baron de la drogue en deux temps trois coups de batte, mettant sur le marché une nouvelle drogue, le crack. On est en pleines 80's à NYC et le petit Nino décide de commencer à avoir de l'ambition: il prend donc le contrôle d'une tour d'immeuble, mettant en place un business vachement bien organisé (avec des database de clients trop bien designées et tout). Mais le pouvoir est une salope qui monte à la tête et qui rend très con, voire suicidaire. Nino, emporté par l'hubris, va se mettre à niquer à tout va, à tuer quand ça lui chante et à se prendre pour un king. C'est sans compter sur Scotty, super-flic à dread undercover de sa race, qui, après avoir récupéré et nettoyé un ancien indic' tombé dans le caillou, va monter une opération de ouf à la manière des services secrets belges qui passent leur temps à déjouer des attentats visant les lapins domestiques de Vervier. L'opération merde un peu, mais on y est presque. C'est un peu en mode MTV des 90's, alors plutôt rigolo (plein de plans pris de traviole comme des les clips de McHammer), il y a d'ailleurs Ice-T qui est aussi mauvais acteur que comédien. C'est fun, mais pas forcément subtil du point de vue du fond - genre philosophie niveau Step Up 2 ( et 3 aussi): "tu es mon ami, je ne te laisserai pas" " non! Je souffre, j'ai laissé mon ami" "Mais, si tu me tues, tu seras comme moi" "Non, sois fort! Ne laisse pas le darkness te gagner" et adlibitum. Heidegger likes this.

Prince of the City parle aussi de prise de pouvoir, mais du côté du manche cette fois-ci, puisqu'il s'agit d'une histoire de prosecution d'un fatras de flic pourris jusqu'au calecif. Ciello est un petit gars sans histoires, juste une grosse ardoise de pots-de-vin et autres bakchich pris à gauche à droite, mais heh, "everybady is-e doing-e it-e" (avec l'accent italien). Alors pourquoi est-ce qu'il décide du jour au lendemain de bosser pour mettre à jour plein de corruption (alors qu'on lui a quasi rien demandé) tout en se disant qu'il est tellement malin qu'on va jamais cramer que lui aussi est dedans jusqu'au cou? Mystère.  Parlez-moi d'hubris, j'ai envie de dire (non mais vraiment, c'est un mot qui me fait des trucs dans la culotte). Et bardaf, tout s'emballe, Ciello ne veut pas donner ses potes, mais de proche en proche et d'aventures en aventures (de train en train, de porte en porte (??)), le voilà emberlificoté dans une montagne de mensonges qui lui file mal au bide (il fait caca tout mou, le pauvre). C'est  un peu un Serpico inversé, avec des trucs pas très clairs au niveau des motivations, mais une chose certaine: les méchants qui veulent devenir gentils feraient mieux de s'abstenir, parce que bonjour les emmerdes. C'est un autre Lumet, et j'apprécie vraiment, toujours dans une certaine distance, parfois énigmatique sur l'intérieur, mais avec des belles scènes de grosses colères un poil obsessionnelle sur les bords. 

Et puis The Pledge, que je pense avoir déjà vu  à sa sortie, dans ma phase "passons la journée à l'UGC avec un seul ticket, meuf"). D'où je m'en rappelais mais moyen. C'est encore une histoire de flic, mais à la retraite et pas décidé à lâcher l'affaire (ni la teille de Jim aussi). Jerry promet à une mère un peu catho sur les bords, qu'il retrouvera l'assassin de sa fille. Manque de pot, Jerry part à la retraire dans 5, 4,3,2,1, 0 heure. Ca va être court donc. Qu'importe! Il n'a rien à foutre de ses journées et plutôt que de les passer à faire des courses aux heures de pointe pour faire chier les vivants ou à aller déposer toutes ses pièce rouges à la banque en pleine sortie des bureaux, Jerry mène l'enquête. Il récupère au passage une jolie môme qui a bien un tiers de son âge, mais qu'importe quand on aime et qu'on a pas peur du "excusez-moi, mais votre papa il bave un peu là". Comme Jerry est finaud, il met la main sur un serial killer de fou qui va justement s'y remettre, c'est pratique! Il est temps de monter un guet-apens, mais le tueur sera-t-il au rendez-vous. Suspensme! 

Ces trois films sont identiques en un point: la justice finale n'a pas lieu, les gentils peuvent aller crever et la Loi est impuissante à protéger ce qui reste de bon aux USA. The Pledge est à cet égard le plus poignant, car si une certaine sorte de morale est sauve (les méchants sont punis), on est quand même face à un échec complet, un homme finalement ruiné alors qu'il voulait juste donner un coup de main (merci Pépé!). C'est noir, très noir, et ça va en s'empirant avec l'âge on dirait. On pourrait coller The Wire à la suite des ces trois coups de sonde (tous à 10 ans d'intervalle! Et j'ai même pas fait exprès!)

New Jack City, van Peebles, 1991
Prince of the City, Lumet, 1981
The Pledge, Penn, 2001

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