lundi 12 septembre 2016

Ecran total

C’est un peu une sélection au hasard cette semaine mais toujours avec des types rendus à moitié fous par la recherche de la vérité, l’absolution et surtout l’obsession de l’innocence.

M’étant récemment remise à Ellroy – la trilogie Hopkins, pas foudroyante du point de vue style mais assez géniale du point de vue trame – je fus bien aise de découvrir que Stone avait fait un film sur JFK et les nombreuses zones d’ombres qui constituent le fonds paranoïaco-complotiste de la trilogie Underworld America. JFK se centre sur le personnage du procureur Garrison, ce cher Harrison Ford*sans son fouet mais avec son chapeau, qui flaire qu’y a anguille sous roche. On suit alors toute l’enquête minutieuse faite afin de démonter la théorie du tireur unique – vachement peu crédible si on en croit Harrison/Garrison. C’est un peu étrange car ça ne sert finalement pas à grand-chose : tout le monde est un peu trempé dedans mais personne n’a vraiment tiré, enfin si, mais bon. On retrouve bien les point sur lesquels Ellroy brode dans son roman : Cuba, les syndicats, la mafia, Hoover, Nixon en fond, le Vietnam et les mouvements des civil  right ; tout est lié parfois via des alliances super chelous comme les USA en ont le secret. Stone prend le parti d’un récit relativement suivi, avec quelques images d’archives mais intercalées presque comme une réalité subliminale qui ferait irruption dans le film. Il aime toujours autant le roulement de tambour militaire (ratatata), calé un peu partout et parfois à la nimp on dirait ; et on retrouve également cet amour du climax émotionnel et visuel avec des zooms dramatiques, des montages épileptiques, enfin tout ce qui peut rendre un truc dans le réel plutôt chiant (4  clampins qui vérifient des alibis, interrogent des témoins et contemplent des blows up d’un film de 45 secondes) en truc carrément ouaouh quoi. Ça marche car malgré ses 3 bonnes heures, on s’est pas fait chier, dis donc !

Comment suis-je tombée sur Bringing out the dead en faisant des recherches sur JFK, mystère. Mais le titre était trop drôle (cfr cette scène géniale du Holy Grail) et puis j’aime les ambulanciers et leur dégaines de taxi blancs. Comme dans beaucoup de Scorsese, il y est question d’un homme qui perd pied  et qui s’enfonce dans une logique de défonce accélérée à laquelle on assiste comme à un accident au ralenti (en fermant un peu un œil mais en matant quand même). L’épave en devenir, c’est Frank, paramedic en burn-out imminent qu’on refuse de virer tant qu’il a pas vu son médecin conseil. Frank fait ce qu’on appelle le graveyard’s shift, terme intéressant qui veut dire service de nuit, pour un hôpital qui récupère tout ce que vomit la nuit new-yorkaise – tarés, clodos, alcolos, drogués, femmes de vie ou de mort, bébés en vadrouille, arrêts cardiaques et crises existentielles. Ça fait beaucoup pour un seul homme qui n’a en plus pas l’air d’avoir beaucoup de distractions en dehors du boulot, le pauvre, il n’a même pas Facebook. Du coup, il se met à voir des fantômes et à parler à des demi-morts, puis pour aller mieux, il ajoute un petit coup de benzédrine à son whisky matinal pis de xanax dans son bourbon vespéral. Mouais. Tout ça va mal finir, on le sent mais on rit, parce que c’est une dégringolade pas loin de la pantalonnade et que les cadavres, les vieux qui se chient dessus et les mecs en OD, tout ça, c’est finalement business as usual et Frank ne se prive pas de rigoler un coup quand l’occasion se présente. Le tout est montré dans une frénésie nocturne un peu sous crack, en alternance avec des moments très doux et contemplatifs, desservis de façon exemplaire par Nicholas Cage qui a eu, un jour, le secret de ces rôles de grands malades aux yeux tristes. Bande-son excellente, comme souvent chez Scorsese, et toujours la tentation du sauveur de la veuve et de l’orphelin, du protecteur de l’innocence urbaine et de la rédemption. Ach.

Toujours avec Cage et toujours dans la descente lente et inexorable vers un crash retentissant et sanglant, on a Bad Lieutenant, Port of call New-Orleans qui n’a donc rien à voir avec l’autre, même si on y voit un lieutenant de police s’enfoncer dans des magouilles de plus en plus ingérables au rythme de paris sportifs foireux sur des matchs de base-ball et d’arrestations arbitraires de petits culs fermes avec pipes à l’arrivée. Bon. D’après Herzog, ça n’a rien avoir avec le Ferrara, d’ailleurs il l’a même pas vu (bravo Werner, belle culture) et donc bah c’est une coïncidence on va dire, et finalement, c’est pas très important puisque le film tient tout seul. Il y a la touche d’Herzog, un peu absurde, avec des visuels hallucinatoires rigolos – très jungle entre les alligators, les iguanes et le reste – et une petite musique à la Dexter qu’on n’a pas bien compris par contre. Cage donne aussi un ton très différent  à l’ensemble avec son côté cocker, son regard de grande désespérée et sa quête de la pureté.

JFK, Stone, 1991
Bringing out the dead, Scorsese, 1999
Bad lieutenant, Port of call New Orleans, Herzog, 2009

*Edit: Oui en fait c'est Keviiiin Costner et pas Harrison Ford, lapsus révélateur qui fera plaisir à mon psy.

2 commentaires:

Vincent Zabladowski a dit…

C'est Kevin Costner dans JFK, pas Harisson Ford...
Pas du tout le même pédigré ;-)

Le chicon masqué a dit…

Mais j'ai fait exprès pour voir si quelqu'un suivait, hein :-)