mardi 16 septembre 2014

Ecran total

Toujours en vrac et dans le désordre:

J'avais adoré Une ordure, que j'ai lu en français. L'adaptation rend justice à l'ambiance crado-écossaise de Welsh et au caractère de gros pourri de Bruce, une bonne ordure de flic aux dents longues et au nez tout poudré. Filmé comme une bonne blague mi-hallucinatoire, mi-clip de Blur, il manque quand même quelques éléments du bouquin qui étaient justement ceux que j'espérais secrètement voir à l'écran: le vers solitaire géant qui habite l'intestin de Bruce n'aurait-il pas pu être une grosse masse informe, entre le pudding radioactif et le phallus cronenbergien? Au lieu de ça, on des séquences bof avec un médecin fou et un vers sur du papier. Autre tic: les masques d'animaux. Genre, c'est en train de devenir un truc. Par contre, et même si j'ai relativement honte, j'ai eu un moment d'émoi quasi sexuel en réentendant ça. La dure vie des coursier DHL polonais.

Plus classieux niveau BO (Screamin Jay Hawkins!) mais moins fun dans l'ensemble est Stranger than paradise. Alors on a compris que c'est une sorte de non-film - y se passe rien, les gens vont et viennent sans jamais aller nulle part, à base de malentendus et de quiproquos qui ne finissent pas toujours bien - un aller simple pour Budapest par exemple, pour notre pauvre héros qu'a même pas pris sa petite laine. Un humour genre du coin des lèvres, une nonchalance bien 80's et des beaux chapeaux.

Boyhood est un concept plutôt qu'un film: l'idée de filmer sur une dizaine d'années les mêmes acteurs relève d'un certain tour de force et d'une conception du temps qui manque un peu aujourd'hui. C'est vraiment bien foutu et pas du tout longuet, vachement bien écrit et joliment joué. L'évolution est surprenante et le manque de scansions temporelles claires ( type " un an après", " six mois plus tard") rend les choses encore plus intéressante puisqu'on ne peut qu'évaluer à vue de nez combien de temps s'est écoulé entre deux séquences. Par contre, c'est plutôt moche du point de vue image - ça ressemble un peu à un film de famille, mais du coup, ça pourrait tout aussi bien fonctionner dans le genre anti-esthétique. La question à deux balles: Ethan Hawk a l'air d'être lié par un contrat bizarre à Linklater - genre pour les 15 prochaines années, ta vie m'appartient, hahaha. Alors, contrat juteux, obsession bizarre ou IOU sataniste? Mystère.

The Secret s'appelle en fait The Tall Man - pour qu'on soit sur de rien piger. Jessica Biel ne ressemble pas beaucoup à elle-même, sauf avec du sang barbouillé partout et les pantoufles dans la gadoue. Le scénario est intéressant, avec parfois un peu beaucoup de rebondissements complexes et fouillés à la fois - je fus confuse. L'ambiance générale entre Russel Banks et The Killing est impeccable, avec des types à casquettes et des pick-ups plein de chiens méchants. Northern comfort? Pour ce qui est du twist final - le business model présenté gagnerait à être examiné par le prochain gouvernement: quid d'une vaste action "Toi aussi, adopte un chômeur wallon!" à l'intention des familles flamandes tendance CDH en mal d'humanitaire?

Filth, Baird, 2013
Stranger than paradise, Jarmusch, 1985
Boyhood, Linklater,2014
The Tall Man, Laugier, 2012

mercredi 10 septembre 2014

Fin(s) de mondes

J’ai récemment entamé un cycle tiré des dernière journées cinématographiques dionysiennes (ha que j’aime cette appellation) autour du thème Fins de Mondes. Comme je ne regarde pas les films dans l’ordre, il y aura probablement un sens final qui m’échappera toujours, mais c’est inconsciemment le but. Ceux que j’ai déjà regardés m’ont cependant bien réjouie.

Dreams raconte 8 rêves de Kurosawa – on ne peut plus simple comme concept. Dans l’ensemble, ça tourne autour de l’idée d’une race humaine qui court à sa propre perte, d’une civilisation qui va finir paumée sur un volcan, perdue dans la montagne, abandonnée sur un rivage radioactif, mais quelques visions résistent et distillent une sorte de couleur plus douce. Une procession de mariage de renards entre aperçue dans la forêt par un petit garçon, un peintre errant dans les toiles de Van Gogh et une procession de funérailles avec des gens qui sautent bizarrement. Je ne suis pas trop convaincue par le visuel onirique de tout ceci qui reste très narratif et perd parfois la force de simultanéité des rêves dans leur état pré-narratif, enchevêtré. Mais ça ressemble plus à des contes en forme d’adieu, de testament peut-être.

Body snatchers demande à ce que je voie toutes les autres versions histoire de pouvoir faire un comparatif, mais j’ai vu celui de Ferrara et il me semble aussi bon qu’un autre. J’aime l’idée que les gens soient  peu à peu remplacés par des robots sans sentiments : dommage qu’on ne pose jamais la question de pourquoi c’est si dramatique. Ici, c’est encore plus beau, parce qu’on ne voit pas trop où ça va : qui veut prendre quoi en otage et pourquoi ? Il y a un côté gratuit plutôt drôle. L’idée qu’on puisse repérer les gentils à ce qu’ils sont tellement préoccupés par les autres qu’ils se font direct choper me fait bien rire : zont qu’a apprendre à encaisser un peu. When the goings get tough, the tough get going après tout.

The King of New-York est lui aussi vraiment réussi – dans la veine des types tout seuls maudits qui finissent en bouillie sur le trottoir. Autant Dafoe dans Go Go tales est super touchant, autant Keitel est atroce dans Bad Lieutenant, autant Glover est indéfinissable ici : il est smooth, mais alors délié et souple comme un crooner aux poumons de velours. J’ai évidemment tout de suite eu la nostalgie de ceci mais j’ai aussi été surprise par tout le contexte musicale de l’émergence du hip-hop et du travail sur l’ambiance coupes afro carrées, épaulettes démesurée et du Schooly D en fond sonore.

Et finalement, The Addiction, toujours du même,  une jolie histoire en N/B sur la dépendance mais aussi sur NY de ces années-là, des bas-fonds d’une ville qui semble avoir un peu disparu d’ailleurs, avec des back alley pleines de types en imper qui mordent le cou des jeunes thésardes en quête de nietzschéisme sanguinolent. L’idée que les vampires écrivent de meilleures thèses que les autres ne m’est pas inconnue et c’est une piste qu’il faudrait penser  à considérer avant toute autre. Beaucoup de gens qui chuchotent ici encore – plus les héros sont puissants, plus ils parlent bas. Ceux qui chouinent le font haut et fort par contre. Intéressant quoique cryptique.

Yume, Kurosawa, 1990.
Body Snatchers, Ferrara, 1993.
The King of New-York, Ferrara, 1990

The Addiction, Ferrara, 1995

mardi 9 septembre 2014

Ecran total

Sans vraiment de tentative de trouver un principe unifiant aux quelques films intéressant vus récemment et dans le désordre :

Freaks, bleuette intéressante de Browning,  qui n’est pas loin d’une comédie de remariage telle que la qualifie Cavell, mais dont l’intérêt est évidemment ailleurs que dans la narration. Une longue exergue en amont du film tente de justifier le choix du réalisateur de montrer l’univers de freaks de cirque (« y sont comme nous mais tout le monde l’est méchant avec eux ») mais plus elle dure, plus elle finit par créer un effet inverse : on s’attend alors à voir un truc franchement dégueulasse, des types avec des bras à la place des pieds et le tout dans une lumière digne et documentaliste. Hum. C’est sans compter que c’est produit par la Metro et que ça reste donc un bon film des familles. Les freaks sont bien sur pas bien jolis (on s’est posé la question de la viabilité de certains amputés, tellement rabotés qu’on se demande bien comment ça marche) mais restent dans l’ensemble plutôt sympas, souvent joviaux, et relativement débrouillards. La mise en scène d’une tromperie amoureuse sur le thème de la bonne qui se chope un nain pour récupérer son fric (genre inédit) ne fait pas oublier les longues séquences fascinées dénuées de tout projet artistique autre que de montrer comment un type sans bras ni jambes arrive à s’allumer une clope. On est bien évidemment impressionnés, mais alors pourquoi ce besoin d’invoquer l’injustice humaine faite aux bêtes de cirques quand elles sont finalement l’objet a du film ?  On parle aussi de ce film comme pré-lynchéen. Enfin, à cette allure là, Bosch l’est aussi, alors bon, hein.

The East raconte une histoire inconnue – est-elle bien crédible ?- celle d’une agent secrète privée qui traque des terroristes écologistes pour le compte de grandes sociétés américaines qui foutent du pétrole dans nos pâtes intégrales. Après moults squattages dans des maisons en cartons, des bains collectifs dans la rivière et des longue soirées tricotage de pull en poils de barbe rousse, elle finit bien sur par (spoiler alert) aimer ses ravisseurs (surtout le grand et poilu Skarsgard, qui décidément sait tout faire, y compris sauter ses nouvelles recrues dans les bois (sans les mains ! ouh !)). Bon, c’est un sujet inédit, plutôt pas mal branlé : pas vraiment d’envergure dans le questionnement moral sous-jacent, des images pas mal dans le genre univers industriel postapocalyptique VS la nature et les petits oiseaux et un rythme pas mal mené.

Je confonds Crash de Cronenberg avec au moins un million d’autres films, du coup j’ai encore du mal à croire que le film que j’ai vu est bien celui qui est le bon. Il y a bien des trucs familiers – le rapport organique/machine, les cicatrices équivoques, les morceaux de ferraille dans tous les sens et des acteurs qu’on dirait qu’on les connaît mais sans jamais savoir si c’est eux (ou leur jumeau canadien maléfique). Pour le reste, c’est plutôt étonnant : les clés du film sont données assez vite (le sexe/la mort/les bagnoles, le tout pris dans une certaine forme d’esthétisation fascinante créée par la société du spectacle) mais les scènes de cul durent étonnamment longtemps – genre constituent probablement 75% du film. A posteriori, ça fait plutôt sens, puisque l’accumulation et l’insistance vont vers une montée graduelle de la violence, mais ça peut interloquer au départ. Ça reste plutôt sexy cela dit – contrairement au reste de la filmo qui fait parfois un peu dégueu.

Freaks, Browning, 1932
The East, Batmanglij, 2013

Crash, Cronenberg, 1996.

mardi 12 août 2014

Na putu

To M.

Slovenija, 2014

lundi 11 août 2014

True Detective


Puisqu'on a certainement déjà tout dit à propos de cette série, je vais me joindre au concert des gens qui chouine leur mère sur cette série, sans vrai souci d'en dire quelque chose de mieux ou de plus malin. Trois choses seulement:

- le personnage de flic super freak, en général en tandem avec un type plutôt normal. Le frlic (frleak?) correspond à un type qu'on voit pas mal dans ces séries policières à ambiance grinçante un peu glauque: Linden dans The Killing, Cross dans The Bridge plus plein d'autres que je zappe. En général, le frlic est méga intelligent, possède une sorte d'intuition un poil zarbi, parle à ses mains et découvre des trucs que personne d'autre il peut les comprendre. Du coup, il est souvent tout seul, n'a pas vraiment de famille, s'habille comme un plouc et est pour ainsi dire légèrement autiste. Ici, on est en plein dedans, avec un petit truc en plus qui fait que. 

- le bayou et le Sud en général: déjà mentionné précédemment, le Sud fascine pour tout un tas de raisons: c'est un réservoirs à redneck et hillbillies en tout genre, c'est un peu le petit secret dégueu des USA, le truc qu'on range sous le tapis et qu'on préfère pas trop montrer aux visiteurs. Mais le bayou génère en plus une certaine fascination, qui joue à plein ici parce qu'il fonctionne à la marge à différents points de vue. Du point de vue géographique parce qu'il est aux confins d'une terre à moitié immergée, toujours à moitié en train de disparaître; du point de vue social, parce qu'il concentre une population plus ou moins livrée à elle-même (en tout cas dans l'image qu'on en donne) à la marge d'une société américaine au sourire bright; du point de vue anthropologique, parce qu'il semble concentrer et mêler des croyances de tous bords en un joyeux bordel vaudou pagano-chrétien de l'extrême. Ici, la marginalité est clairement le sujet: les longs plans aériens sur les swamps, les images immobiles de caravanes posées sur des cailloux au milieu de nulle part, les arbres à moitié crevés, des communautés en pure décomposition qui végètent sur le bord de routes abandonnées et une logique spirituelle à la limite même d'une spiritualité "moderne".



- Le personnage de Cohle enfin, écrit par un putain de Schopenauerien en pleine décompensation heidegérienne, qui fout un coup de mou à tous les personnages de flics cyniques jamais écrits. Beaucoup de gens sont étonnés par la prestation de McConaughey, mais ceux qui l'ont vu dans Joe connaissent déjà son bon vieil accent traînant qui pue le bourbon. Là où c'est radical ici, c'est qu'il ne plie jamais vraiment, sauf peut-être à la fin (moment moyennement validé par moi). Les personnages de grands cyniques ne sont en général supportés que pour deux raisons: ils font avancer les choses, parce que souvent les plus finauds et ils sont en fait humains (le fameux moment-où-on-comprend-qu'en-fait-il-a-trop-souffert-mais-dans-le-fond-il-aime-aussi-les-lolcats). Ici, ce moment arrive vraiment in extremis- est-ce que ce serait un petit manque de couilles au niveau de l'écriture? Je trouve que. Mais pour le reste, le personnage est écrit comme un pur cynique qui finalement dit un certain nombre de choses avec lequel on peut difficilement ne pas être d'accord. Ce qui est plutôt drôle, c'est que pour qu'un personnage pareil puisse exister à la télé aujourd'hui, il doive automatiquement être un type complètement barré, un peu comme si c'était inconcevable qu'une personne normale tienne ce genre de discours. Pour ma part, je suis assez d'accord avec ce qu'il dit, et je ne vois pas encore de trucs dans le ciel quand je réfléchis trop. Ça renvoie d'ailleurs à un truc qu'il dit lui-même sur le besoin d'intégrer une expérience à une narration rassurante (autour du deuxième ou troisième épisode). De là à dire qu'il y à auto-méta référence infratextuelle, bah on va laisser ça aux dérridéens bretons. Mais ça en dit quand même long sur l'aveuglement de l'époque actuelle à considérer les choses comme elles le sont et cette putain d'obligation du bonheur qui finira par rendre fou pas mal de gens.

Voilà trois bonnes raisons de regarder ça. Y'en a plein d'autres aussi et probablement une masses de commentaires plus intelligents à faire sur la métaphysique de Cohle, mais ça me semble suffisant.

samedi 2 août 2014

Southern Comfort

Je suis récemment tombée sur une série d’œuvres en rapport avec le Dirty South qui m'ont pas mal fait réfléchir quant aux raisons de cette fascination pour cet espace fait de vieux types chelous, de pick-up poussiéreux et de trailerparks. 

Il existe un terme qui se rapporte à ce genre: le Southern Gothic. Si ça caractérise un genre litéraire plutôt typé et daté, on pourrait étendre le terme et y attacher pas mal d'autres œuvres. Dison en gros qu'il s'agit d'un univers situé dans le Sud des USA, dans des milieux souvent plutôt ruraux ou peu urbanisé, peuplés des gens à la ramasse: difficile ici de déterminer ce qui relève du white-trash, du redneck et du hillbilly - je crois commencer à comprendre, mais ça fera l'objet d'un autre article. Ce qui est sur, c'est qu'ils sont tous pas bien malins, survivent aux franges d'une société à moitié livrée à elle-même - ce qui reflète plus ou moins bien la situation économico-sociale du Sud - ultraviolente et fonctionnant avec des codes pas loin du primitivisme. S'y mélangent un fatras de thématiques difficiles à démêler les unes des autres: racisme supposément atavique du Sud, influence de cultures paiennes/vaudoues, bonne vieille obsession américaine pour la religion en général, le tout pris dans une polarisation Nord/Sud qui fait de l'un le con de l'autre.

Le film parangonique est probablement Deliverance. Redneck contre gens normaux, dans un univers naturel que ces derniers maîtrisent peu, consanguinisme et violence sexuelle, tout y est. De façon intéressante, on retrouve quelque chose de similaire à Southern Comfort, qui part du même principe (des soldats en exercices se frottent à des cajuns pas mignons qui les chassent dans un marécage tentaculaire): à chaque fois, le groupe de gentils incriminés n'est en fait pas tellement sympa. Ils l'ont u peu cherché quoi. On pourrait s'attendre à ce que les forces mises en présence soient diamétralement opposées (style un hipster de Portland se perd dans l'Alabama profonde), mais en fait non. Puisque je doute que ces deux films aient une quelconque ambition politico-éducative (style: "regardez-les avec leurs enfants à trois doigts nourris au moonshine, sont pö si méchants"), c'est intéressant à relever. 

Après il y a les films avec des gentils sauvages, comme Beast of the Southern Wild. On pourrait arguer que c'est un peu facile de transformer une région-cloaque abandonnée par la société en une sorte de phalanstère en cabanes de bois, mais c'est un des rares films que j'ai vu sur le Sud qui en donne une vision positive.

Il y a aussi des films à dimension sociale (on va dire), des tranches de vie qui tournent autour de personnages en général foutus depuis le début, qui tentent péniblement de s'en sortir. Faciles à reconnaître, ces films cumulent en général un certains nombres d'éléments: chemise de flanelle, chien méga violent, caravane/vieille ferme à moitié abandonnée, père absent/mère alcoolique, maisons de passe clandestine, gros DMC plein de vieilles flasques de bourbon et  fusil à canon scié sur le siège passager. Entre le cirque de freak et la chronique sociale, on a parfois un peu du mal à faire la part des choses. Winter's bone est un bon exemple de cette tendance, ou plus récemment vu, Joe, (un peu comme Killer Joe, mais dans une plus jolie caravane) avec un Nicolas Cage tout en barbe de cinéma d'auteur qui finit par balancer un vieux père alcoolique par-dessus eul'pont. Cela dit, on peut se poser ici la question de ce que recouvre ce genre: si Joe correspond bien à ce type de film sur l'Amérique profonde, violente et à moitié demeurée qu'on retrouve souvent dans le Southern Gothic, ça pourrait être n'importe quel redneck, de n'importe quelle godforsaken town du fin fond du Midwest. A cet égard, l'excellent recueil de nouvelles de Frank Bill, Crimes in Southern Indiana laisse rêveur face à son avalanche de bouseux qui cuisinent de la méthamphétamine dans leur jardin entre deux partie de chasse au raton. Pourtant, on est pas vraiment dans le Sud.

Parce que dans le Sud, il y a ces visions marécageuses, ces images d'une terre à moitié désolée, aux arbres pétrifiés dont les racine plongées dans la fange et les silhouettes fantomatiques donnent un air presque tarkosvkien au paysage. Le Sud, c'est pas du soleil sur ta peau et du vent dans tes cheveux: il y a une inertie dans l'air, une pesanteur de l'atmosphère, un ciel bas, humide, des tonalités  gris/brun et des étendues d'eau boueuse qui croupissent dans une attente immobile. True Detective quoi.

mardi 15 juillet 2014

Ecran total

Quelques films à chapeaux de cowboy, tous dans des styles plutôt différents:

- Nashville est un film choral d'Altman qui tourne autour de la métropole musicale et de ses multiples visiteurs. On suit en parallèle une star de la country en pleine décompensation, qui rechigne sur son lit d’hôpital en voyant sa rivale triompher à sa place, un vieux chanteur tout en dents, une journaliste de la BBC qui se prend pour Louis Malle dans un dépôt de bus scolaires abandonnés, un jeune beau qui écrit des chansons pour une femme/toutes les femmes et surtout des wannabe chanteuses qui gravitent autour de tout ça en satellite un peu orbité, sur le bord de la route, embarquée en stripteaseuse malgré elle ou planquée dans les coulisses. Ça fait beaucoup, mais finalement, ça tient deux heures trente sans qu'on s'en aperçoive. Il y a beaucoup de musique, fatalement, qui donnent envie même si parfois un peu kitsch, beaucoup de bruits en même temps, un bordel parfois difficile à démêler. On retrouve plein d'images obsessionnelles d'une Amérique sur le déclin: des guirlandes, des flonflons, des majorettes à sourires brites.

- Walk Hard, c'est plutôt une blague, puisque c'est une parodie de biopic autour de Johnny Cash qui lui fait traverser plus ou moins toute l'histoire du rock'n'roll américain. Plein de gimmick qui reviennent, un certain nombre de têtes vues ailleurs - Wiig, en fiancée de 12 ans et Jack White en Elvis sous amphète- et des chansons.... finalement pas SI mauvaises. 

- Zabriskie Point est un film méta-américain. Sur fond de contestation étudiante des 70's, Antonioni met en scène un espace imaginaire américain ultra fantasmé, qui mêle des visions du sud profond, des images de l'Ouest sauvage et l'évocation du cauchemar urbain des mégalopoles.



Le film tente de répondre à la question " Comment devient-on révolutionnaire". La réponse est ici simple - il suffit de coucher avec un révolutionnaire. Si Marx y avait pensé, la révolution aurait probablement eu lieu plus tôt. Les deux longues séquences autour des événement centraux -le sexe et l'attentat- semblent en tout cas pointer dans cette direction via une démultiplication qui est étonnamment chiante pour le sexe et plutôt génialissime pour l'attentat, via des explosions en série qui envoient voler le contenu de réfrigérateurs pleins - on voit même un homard en apesanteur. Splendides images du désert, sorte de western moderne en mode Malick et surtout une bande-son carrément cool.


Nashville, Altman, 1975
Walk Hard, Kasdan, 2007
Zabriskie Point, Antonioni, 1970.